Stanson, en possession depuis trente-cinq ans d’un siége à la chambre des Communes. Oui, depuis que les Derby, en parcourant notre comté, peuvent dire : ces forêts, ces rivières, ces bourgs, ces vallées sont à nous, ils ont pu dire aussi, et ils disent : il faut que les représentants de ce pays soient à nous.
Non… non… Oui… oui…
Vous le niez en vain, le comté a sept places au parlement ; les Derby y envoient sept âmes damnées : c’est l’enfer représenté par les sept péchés capitaux. — (Huées, applaudissements.) Leur règne est fini ; un simple avocat, moi, votre homme, votre ouvrage, j’ose me mesurer avec eux, parce que vous avez compris vos droits, parce que vous vous êtes dit : à nous tous nous sommes plus riches qu’eux ; puisque la liberté s’achète avec des guinées, donnons des guinées. — (Bravos presque universels.) Avec nos modestes souscriptions, nous nous rirons des cent mille livres sterling des Derby. Hommes oranges, vous voulez de l’or ? allez aux Derby ; c’est leur couleur ; citoyens bleus, vous voulez vos droits ? mettez-moi l’arme à la main par vos suffrages, et je vous donne ma vie pour les défendre. — (Sifflets, houras.) Sir Stanson, vous vous croyiez déjà assis à l’aise dans le fauteuil où le représentant élu est porté en triomphe ; mais avant de vous laisser retomber dans votre sommeil septennal, je viens vous secouer un peu ; laissez là votre modestie ; dites-nous ce que vous avez fait pour nous, célébrez vos combats ; montrez-nous votre corps amaigri par les veilles ! — (Rire général.) Allons, que Darlington soit plus heureux que Westminster ; qu’il entende votre voix, et pour acheter le privilège d’aller vous taire sept ans dans la chambre, enrouez-vous une fois en plein air. — (Rires, mouvement de mécontentement des jaunes.) Concitoyens, monsieur Stanson a pour lui le passé, moi je n’ai que l’avenir : malgré cette différence, essayez d’un député qui, corps et âme, est à vous, qui défendra pied à pied vos droits et votre argent ; qui, après chaque session, viendra vous dire : voilà ce que j’ai fait, êtes-vous contents ?
Habitants de Darlington, pour condamner l’audace de la tentative qu’on fait aujourd’hui, — (Sifflets, applaudissements : Stanson répète sa phrase.) je ne veux pas invoquer d’autre fait que ce qui se passe sur cette place.
Qu’y a-t-il de si terrible ?… Pourquoi donc ?… Taisez-vous !… silence !
Comparez ce tumulte, ces préparatifs de guerre au calme des dernières élections.
Silence donc… On a laissé parler monsieur Richard.
Permettrez-vous que le premier audacieux venu ose troubler ainsi la paix du comté ?
Anglais, silence !… le bruit fait mal à la tête de monsieur Stanson.
Depuis quand ose-t-on parler avec cette irrévérence de la noble famille des Derby, le plus beau, le plus ancien diamant de la couronne d’Angleterre ?
Bravo ! bravo !
Qu’est-ce que cela nous fait ?
Depuis trois cents ans les Derby sont les maîtres…
Vous avez entendu les candidats ; que ceux qui sont d’avis de nommer monsieur Richard lèvent la main. — (Un grand nombre de mains se lèvent.) Que ceux qui sont d’avis de nommer monsieur Stanson lèvent la main. — (Huées, cris. Un moindre nombre de mains se lèvent.) Mon avis est que M. Richard est nommé représentant de la ville de Darlington.
Nous demandons le scrutin du poll !
Monsieur Stanson demande le scrutin. Les candidats ont-ils nommé les officiers du poll ?
Oui, oui ; ils sont prêts.
Nous voici.