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HENRI DE FAVERNE.

À chaque fois je m’approchai du garde-chiourme avec l’intention de l’interroger ; mais à chaque fois je rencontrai le regard de Gabriel Lambert si humilié, si suppliant, que je remis à un autre moment l’explication que je voulais demander.

À cinq heures de l’après-midi nous rentrâmes.

Comme le reste de la journée devait être pris par le dîner et par le travail, je congédiai mon garde-chiourme et sa troupe, en lui donnant rendez-vous pour le lendemain matin à huit heures.

Malgré moi je ne pus penser à autre chose qu’à cet homme. Il nous est arrivé parfois à tous de chercher dans notre souvenir un nom qu’on ne peut retrouver, et cependant ce nom on l’a parfaitement su. Ce nom fuit pour ainsi dire devant la mémoire ; à chaque instant on est prêt à le prononcer, on en a le son dans l’oreille, la forme dans la pensée ; une lueur fugitive l’éclaire, il va sortir de notre bouche avec une exclamation, puis tout à coup ce nom échappe de nouveau, s’enfonce plus avant dans la nuit, arrive à disparaître tout à fait, si bien qu’on se demande si ce