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SCHÉELE.

circonstances où le sel avait été placé. Bergman étonné s’en prend à quelque impureté du salpêtre. Il renvoie ce sel par un de ses élèves, qui ne manque pas une occasion si belle de rudoyer un peu le pauvre garçon apothicaire qui l’avait livré. Mais Schéele s’informe de ce qui s’est passé, se fait expliquer les détails de l’expérience, et il en donne immédiatement l’explication. À peine celle-ci est-elle rapportée à Bergman, qu’il accourt auprès de Schéele, l’interroge, et découvre, à sa grande surprise, à sa grande joie, sous l’humble tablier de l’élève en pharmacie, un chimiste profond et consommé ; un chimiste de haute volée, à qui se sont déjà révélés nombre de faits inconnus ; un chimiste qui, loin de s’en tenir aux détails de la pratique, lui développe, sur la composition de l’air et sur la théorie de la chaleur, les idées qui ont servi de base à son Traité de l’air et du feu, dans lequel il a dépassé Priestley et où il s’est quelquefois approché de Lavoisier.

La connaissance fut bientôt faite, et l’amitié de ces deux grands hommes ne s’est jamais démentie. Bergman chercha les moyens d’être utile à son jeune ami et de le placer convenablement ; mais Schéele craint les distractions ; frappé de tous les événements qui à chaque instant viennent contrarier sa carrière, il veut se retirer dans un lieu tranquille, vivre seul et isolé du monde. On lui propose la direction de