Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/306

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lac. Il m’a dit depuis que la garnison du château de Janina, fatiguée d’un long service…

Ici Haydée arrêta son regard expressif sur Monte-Cristo, dont l’œil ne quitta plus ses yeux. La jeune fille continua donc lentement, comme quelqu’un qui invente ou qui supprime.

— Vous disiez, signora, reprit Albert, qui accordait la plus grande attention à ce récit, que la garnison de Janina, fatiguée d’un long service…

— Avait traité avec le séraskier Kourchid, envoyé par le sultan pour s’emparer de mon père ; c’était alors que mon père avait pris la résolution de se retirer, après avoir envoyé au sultan un officier franc, auquel il avait toute confiance, dans l’asile que lui-même s’était préparé depuis longtemps, et qu’il appelait kataphygion, c’est-à-dire son refuge.

— Et cet officier, demanda Albert, vous rappelez-vous son nom, signora ?

Monte-Cristo échangea avec la jeune fille un regard rapide comme un éclair, et qui resta inaperçu de Morcerf.

— Non, dit-elle, je ne me le rappelle pas ; mais peut-être plus tard me le rappellerai-je, et je le dirai.

Albert allait prononcer le nom de son père, lorsque Monte-Cristo leva doucement le doigt en signe de silence ; le jeune homme se rappela son serment et se tut.

— C’était vers ce kiosque que nous voguions.

Un rez-de-chaussée orné d’arabesques, baignant ses terrasses dans l’eau, et un premier étage donnant sur le lac, voici tout ce que le palais offrait de visible aux yeux.

Mais au-dessous du rez-de-chaussée, se prolongeant dans l’île, était un souterrain, vaste caverne où l’on nous conduisit, ma mère, moi et nos femmes, et où gisaient,