Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 5.djvu/177

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— Que lui avez-vous fait ? dit-il.

— Moi ? rien, personnellement du moins, dit Monte-Cristo.

— Cependant cette scène étrange doit avoir une cause ?

— L’aventure du comte de Morcerf exaspère le malheureux jeune homme.

— Y êtes-vous pour quelque chose ?

— C’est par Haydée que la Chambre a été instruite de la trahison de son père.

— En effet, dit Morrel, on m’a dit, mais je n’avais pas voulu le croire, que cette esclave grecque que j’ai vue avec vous ici, dans cette loge même, était la fille d’Ali-Pacha ; mais je n’ai point voulu le croire.

— C’est la vérité, cependant.

— Oh ! mon Dieu ! dit Morrel, je comprends tout alors, et cette scène était préméditée.

— Comment cela ?

— Oui, Albert m’a écrit de me trouver ce soir à l’Opéra ; c’était pour me rendre témoin de l’insulte qu’il voulait vous faire.

— Probablement, dit Monte-Cristo avec son imperturbable tranquillité.

— Mais que ferez-vous de lui ?

— De qui ?

— D’Albert !

— D’Albert ? reprit Monte-Cristo du même ton, ce que j’en ferai, Maximilien ? Aussi vrai que vous êtes ici et que je vous serre la main, je le tuerai demain avant dix heures du matin. Voilà ce que j’en ferai.

Morrel, à son tour, prit la main de Monte-Cristo dans les deux siennes, et il frémit en sentant cette main froide et calme.

— Ah ! comte, dit-il, son père l’aime tant !