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Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 5.djvu/201

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— Sans doute ; qu’est-ce que cela veut dire ?

— Cela veut dire que vous tirez le premier.

— Je tire le premier ?

— Oh ! cela, je l’ai obtenu ou plutôt exigé ; nous leur faisions assez de concessions pour qu’ils nous fissent celle-là.

— Et à combien de pas ?

— À vingt.

Un effrayant sourire passa sur les lèvres du comte.

— Morrel, dit-il, n’oubliez pas ce que vous venez de voir.

— Aussi, dit le jeune homme, je ne compte que sur votre émotion pour sauver Albert.

— Moi, ému ? dit Monte-Cristo.

— Ou sur votre générosité, mon ami ; sûr de votre coup comme vous l’êtes, je puis vous dire une chose qui serait ridicule si je la disais à un autre.

— Laquelle ?

— Cassez-lui un bras, blessez-le, mais ne le tuez pas.

— Morrel, écoutez encore ceci, dit le comte, je n’ai pas besoin d’être encouragé à ménager M. de Morcerf ; M. de Morcerf, je vous l’annonce d’avance, sera si bien ménagé, qu’il reviendra tranquillement avec ses deux amis, tandis que moi…

— Eh bien ! vous ?

— Oh ! c’est autre chose, on me rapportera, moi.

— Allons donc ! s’écria Maximilien hors de lui.

— C’est comme je vous l’annonce, mon cher Morrel ; M. de Morcerf me tuera.

Morrel regarda le comte en homme qui ne comprend plus.

— Que vous est-il donc arrivé depuis hier soir, comte ?

— Ce qui est arrivé à Brutus la veille de la bataille de Philippes : j’ai vu un fantôme.