Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/267

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— Trouver… interrompit Nicolas plein d’angoisses, trouver qui ?

— Un moment, que je réfléchisse, interrompit Chicot ; trouver… M. d’Épernon.

— M. d’Épernon, l’ami du roi ?

— Précisément ; vous le prendrez à part.

— Monsieur d’Épernon ?

— Oui, et vous lui conterez toute l’affaire du toisé de la route.

— Est-ce folie, Monsieur ?

— C’est sagesse, au contraire, suprême sagesse.

— Je ne comprends pas.

— C’est limpide, cependant. Si je vous dénonce purement et simplement comme l’homme aux mesures et l’homme aux cuirasses, on vous branchera ; si, au contraire, vous vous exécutez de bonne grâce, on vous couvrira de récompenses et d’honneurs… Vous ne paraissez pas convaincu !… À merveille, cela va me donner la peine de retourner au Louvre ; mais, ma foi, j’irai quand même : il n’est rien que je ne fasse pour vous.

Et Nicolas Poulain entendit le bruit que faisait Chicot en dérangeant les branches pour se lever.

— Non, non, dit-il ; restez ici, j’irai.

— À la bonne heure ! Mais vous comprenez, cher monsieur Poulain, pas de subterfuges, car demain, moi, j’enverrai une petite lettre au roi, dont j’ai l’honneur, tel que vous me voyez, ou plutôt tel que vous ne me voyez pas, d’être l’ami intime ; de sorte que, pour n’être pendu qu’après-demain, vous serez pendu aussi haut et plus court.

— Je pars, Monsieur, dit le lieutenant atterré ; mais vous abusez étrangement…

— Moi ?

— Oh !

— Eh ! cher monsieur Poulain, élevez-moi des autels : vous étiez un traître il y a cinq minutes, je fais de vous un