Page:Dupuis - Abrégé de l’origine de tous les cultes, 1847.djvu/432

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ne faisait avant de naître. Ce serait chercher ce que devient le principe harmonieux d’un instrument musical quand l’instrument est brisé. Je n’examinerai que le motif qui a déterminé les législateurs anciens à imaginer et à accréditer cette opinion, et les bases sur lesquelles ils l’ont établie.

Les chefs des sociétés, et les auteurs des initiations destinées à les perfectionner, ont bien senti que la religion ne pouvait servir utilement la législation qu’autant que la justice des dieux viendrait à l’appui de celle des hommes. On chercha donc la cause des calamités publiques dans les crimes des humains. Si le tonnerre grondait aux cieux, c’était Jupiter irrité contre la Terre : les sécheresses, les pluies trop abondantes, les maladies qui attaquaient les hommes et les troupeaux, la stérilité des champs et les autres fléaux n’étaient point le résultat de la température de l’air, de l’action du Soleil sur les éléments, et des effets physiques, mais des signes non équivoques de la colère des dieux. Tel était le langage des oracles. L’imposture sacerdotale fit tout pour propager ces erreurs, qu’elle crut utiles au maintien des sociétés, et propres à gouverner les hommes par la peur ; mais l’illusion n’était pas complète. Souvent les générations les plus coupables n’étaient pas malheureuses ; des peuples justes et vertueux étaient souvent affligés ou détruits. Il en était de même dans la vie particulière, et le pauvre était rarement le plus corrompu. On demandait, comme Callimaque, aux dieux la vertu et un peu de fortune, sans laquelle la vertu