Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/311

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des vœux continuels pour son bonheur. Je vous l’avais donnée, hélas ! croyant associer les vertus à l’honneur.

— La malheureuse ! dit Joachim, je lui pardonne…

— Non, Joachim, ne lui pardonnez pas. Vous n’en avez pas le droit. Quand un membre est gangrené, on le sépare du corps. Le corps reste mutilé, il est vrai, soupira-t-elle, marqué d’un stigmate, mais le monde comprend et respecte cette souffrance et ce sacrifice.

De même que la baronne, dont le seul défaut était l’enthousiasme d’elle-même, n’eût point renoncé à occuper le monde de son importance, elle n’eût pas renoncé facilement à l’occuper de sa douleur.

Une pensée d’affaire s’insinuait dans l’esprit de Joachim.

Il reprit : C’est vous qui êtes le plus cruellement atteinte par ce coup terrible. Ah ! si mon dévouement, mes soins pouvaient adoucir pour vous…

— Je vous remercie, Joachim, vous êtes un grand cœur. Vous seul pouvez me consoler, et je l’espère, vous me consolerez. Vous êtes ma famille maintenant.

— Triste famille, triste fils ! ruiné, trahi ! n’ayant plus que vous !

— Ne vous découragez pas, dit la baronne. Songeons à ce que vous devez faire.

— Je vais tout vendre, dit-il, et maintenant sans femme, sans maison, je vais quitter le monde.

— Mais vous avez ma maison. Vous y serez entouré d’amis pleins d’égards. Notre infortune commande à nos amis de nous venir en aide. Je vais solliciter pour vous une recette, un consulat.