Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/84

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suivrai partout tous les deux. Eh bien ! répondrez-vous ? Nous allons y aller ensemble !

Elle se précipita vers ses armoires comme pour s’habiller.

— Non, Rose c’est de la folie, j’attendrai qu’elle se passe. Écoutez-moi.

Il était difficile d’avoir mieux bras et jambes coupés. Il était consterné, anéanti. Sa femme, celle-ci, toutes les mêmes, débordantes, envahissantes, excédantes. Il eut un moment envie de prendre son chapeau et de s’élancer dehors.

La mission en Allemagne lui apparaissait comme le plus attirant refuge. Là, le repos, l’oasis du calme, les délices d’être à soi tout seul !

Mme d’Archeranges jeta tout à terre et revint à lui si furieusement qu’il crut qu’elle allait le battre.

— Vous ne m’avez jamais aimée, vous ne m’aimez pas, vous êtes vil, vaniteux…

— Égorgez-moi, dit-il avec un soupir de lassitude.

Certes, il ne l’aimait pas dans la force du terme, mais il lui était attaché par mille liens : la vanité, l’habitude, un genre d’esprit qui lui plaisait, des caprices qui le tenaient en haleine.

— Croyez-vous que je vous aie sacrifié mon honneur sans avoir pris des droits sur vous en échange ? Serez-vous infâme ! s’écria-t-elle, car nulle femme irritée ne croira se tromper en affirmant qu’elle a tout sacrifié et qu’on lui refuse tout.

Et cependant Rose n’aimait point Joachim. Il n’avait pour elle que l’attrait d’un instrument, l’instrument du