Page:Durkheim - Les Règles de la méthode sociologique.djvu/201

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qu’ils doivent se poser pour le sociologue dans de tout autres termes que pour la foule, et que les solutions, d’ailleurs partielles, qu’il y peut apporter ne sauraient coïncider exactement avec aucune de celles auxquelles s’arrêtent les partis. Mais le rôle de la sociologie à ce point de vue doit justement consister à nous affranchir de tous les partis, non pas tant en opposant une doctrine aux doctrines, qu’en faisant contracter aux esprits, en face de ces questions, une attitude spéciale que la science peut seule donner par le contact direct des choses. Seule, en effet, elle peut apprendre à traiter avec respect, mais sans fétichisme, Les institutions historiques quelles qu’elles soient, en nous faisant sentir ce qu’elles ont, à la fois, de nécessaire et de provisoire, leur force de résistance et leur infinie variabilité.

En second lieu, notre méthode est objective. Elle est dominée tout entière par cette idée que les faits sociaux sont des choses et doivent être traités comme telles. Sans doute, ce principe se retrouve, sous une forme un peu différente, à la base des doctrines de Comte et de M. Spencer. Mais ces grands penseurs en ont donné la formule théorique, plus qu’ils ne l’ont mise en pratique. Pour qu’elle ne restât pas lettre morte, il ne suffisait pas de la promulguer ; il fallait en faire la base de toute une discipline qui prît le savant au moment même où il aborde l’objet de ses recherches et qui l’accompagnât pas à pas dans toutes ses démarches. C’est à instituer cette discipline que nous nous sommes attaché. Nous avons montré comment le sociologue devait écarter les notions anticipées qu’il avait des faits pour se mettre en