Page:Edgeworth - Contes de l enfance.djvu/196

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— Mais vous soupirez ?

— Finis ton souper.

— J’ai fini, s’écria Jean en avalant vivement la dernière bouchée. Et maintenant, dit-il, passez-moi la grande aiguille ; il faut que je raccommode la bride de Pied-Léger avant d’aller me coucher. »

Pour travailler, il s’approcha de la lumière et du feu ; Mme Preston rapprocha les tisons les uns des autres, et reprit ainsi :

« Mon cher Jean, est-il toujours estropié ?

— Qui, Pied-Léger ? Oh non, non ! jamais il ne s’est mieux porté ; on dirait qu’il rajeunit, qu’il engraisse.

— Que Dieu le conserve ! c’est justice ; nous verrons, Jean ; soigne-le toujours bien.

— Pourquoi, ma mère ?

— Pour le mener à la foire de lundi en quinze, où il devra être… vendu.

— Pied-Léger ! s’écria Jean, en laissant tomber la bride de ses mains. Quoi ! ma mère, vous voulez vendre Pied-Léger ?

— Je ne le veux pas ; mais il le faut, Jean.

Il le faut, vous dites il le faut ? Pourquoi le faut-il mère ?

Il le faut, te dis-je, mon enfant, Ne dois-je pas payer honorablement mes dettes ? ne dois-je pas m’acquitter du prix de ma ferme ? J’ai déjà