Page:Edgeworth - Contes de l enfance.djvu/216

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postillons. Leurs paroles, leurs jurements continuels le choquèrent d’abord ; car, quoique paresseux, il n’était encore ni méchant ni grossier. Il se familiarisa cependant bientôt avec leur étrange vocabulaire et prit goût à leurs jeux, à leurs querelles et à leurs disputes. Il s’accoutuma si bien à ce genre de vie, qu’il ne tarda pas à se rendre chaque jour à l’écurie et à faire de la cour de l’auberge son séjour habituel. Là il trouva un soulagement à l’ennui qu’il éprouvait déjà de ne rien faire ; d’heure en heure, en effet, il assistait, les coudes appuyés sur ses genoux et sa tête dans ses mains, aux actes de méchanceté des postillons et des valets d’écurie. Ces hommes toujours chantant, toujours jurant, toujours hurlant, se familiarisèrent avec lui : et, pour compléter sa ruine, il se lia d’intimité avec le valet d’écurie, son premier compagnon de jeu, un franc mauvais sujet.

Nous verrons plus tard quelle fut la conséquence de cette liaison ; il est temps maintenant de revenir à notre ami Jean.

Un jour qu’il venait de terminer sa tâche, le jardinier le pria de rester quelques minutes de plus pour l’aider à porter des pots de géranium dans la salle. Jean, toujours actif et obligeant, obéit aussitôt, et, comme il portait un pot de fleurs fort lourd au moment où sa maîtresse entrait dans la salle :