Page:Edgeworth - Contes de l enfance.djvu/228

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« Ouvre, dit la mère à son fils, je crois que c’est la laitière qui apporte le lait. » C’était le fermier Truck qui venait chercher Pied-Léger ; la pauvre mère changea aussitôt de visage, et dit à son fils :

« Fais partir Pied-Léger. » Mais Jean était déjà à l’écurie, au grand étonnement du fermier.

« Asseyez-vous, » dit la veuve Preston en s’adressant à Truck ; puis, après quelques minutes d’attente : « Si madame savait combien Jean était attaché à ce pauvre Pied-Léger ! » Et séchant une larme : « Il ne le laissait jamais manquer de rien. Asseyez-vous donc, voisin ! »

Le fermier avait à peine pris un siège que Jean rentra, la figure toute décomposée, blanc comme la neige.

« Qu’y a-t-il ? s’écria la maîtresse.

— Que Dieu prenne pitié de mon enfant ! dit la mère en le regardant d’un air inquiet ; et elle s’avança vers lui.

— Tout est perdu ! s’écria Jean qui fondait en larmes.

— Qu’est-ce qui est perdu ? demanda la mère.

— Mes deux guinées, les deux guinées de Pied-Léger. Je voulais vous les donner, ma mère, mais le pot dans lequel je les avais placées est disparu. Tout est perdu, ajouta-t-il avec un gros soupir. Je les avais hier soir, j’étais si heureux de les avoir gagnées moi-même, je me faisais une si