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rement, de même des parties de (P) ; toutes ces lois sont des conventions. Pour éviter les contradictions, il est seulement nécessaire de choisir le reste de (P) de telle façon que (G) et la totalité de (P) soient ensemble conformes à l’expérience. Par cette conception, la géométrie axiomatique et cette partie des lois de la nature qui possède le caractère de conventions apparaissent, au point de vue épistémologique, comme étant d’égale valeur.

Sub specie æterni la conception de Poincaré est, d’après mon avis, parfaitement juste. La notion de corps-étalon, comme celle d’horloge-étalon qui lui est coordonnée dans la théorie de la relativité, ne trouve pas dans le monde réel un objet lui correspondant exactement. Il est en outre manifeste que le corps solide et l’horloge ne jouent pas le rôle d’éléments irréductibles dans le système de concepts de la physique, mais seulement de formes composées qui ne doivent pas jouer un rôle indépendant dans la construction de la physique théorique. Mais c’est ma conviction que ces notions, étant donné l’état actuel de la physique théorique, doivent encore être utilisées comme notions indépendantes ; car nous sommes encore loin d’une connaissance assez solide des fondements théoriques pour pouvoir fournir des constructions théoriques exactes de ces formes.

En ce qui concerne l’objection qu’il n’existe pas de corps réellement rigides dans la nature, et que par conséquent les propriétés qui en sont affirmées ne concernent nullement la réalité physique, elle ne me paraît pas être si forte qu’on pourrait le croire à un examen superficiel. Car il n’est pas difficile de déterminer l’état physique d’un étalon d’une manière si exacte qu’il reste suffisamment identique par rapport à la position relative des autres étalons, en sorte qu’il puisse être substitué au corps rigide. C’est à ces étalons que seront rapportés les énoncés sur les corps rigides.

Toute géométrie pratique repose sur un principe accessible à l’expérience que nous allons esquisser. Nous appellerons la