Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/119

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force de complaisances, — avait obtenu la garde du sémaphore, au Pilier.

Elle était toujours magnifique dans la force de ses trente ans, épanouie au grand vent comme une algue en pleine eau. Ses jupes et son caraco se gonflaient par-dessus les fruits mûrs de ses hanches et de ses seins proportionnés, qui semblaient s’offrir sans cesse aux mouvements de son corps souple. Elle avait les jambes à l’air sous le cotillon court des Sables, les manches troussées, le cou nu ; elle ne sentait pas le froid tant chauffait le sang qui roulait dans ses artères. De belle humeur, de royale santé, rude au labeur, rude au plaisir, la Gaude était une splendide femelle, qui mâtait les hommes, qui mâtait la vie, redoutable comme une force inconsciente de la nature.

Elle avait embauché Piron qui coltinait joyeusement pour elle des sacs de hardes. Beaulieu, le patron du Martroger, hâtait le débarquement pour rentrer à Noirmoutier avant basse mer. Il y avait trois fûts de pétrole à mettre à terre et du charbon pour le phare. Beaulieu pria Charrier de leur donner la main, mais sa femme répondit aigrement.

— Laisse donc s’débrouiller ceuss qu’arrivent, on fiche le camp nous autres.

— Et Sémelin ? réclama Beaulieu.

— Il dort à c’te heure ! Je vas parer l’treuil…