Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/210

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reuses ; et Bernard la prit par le bras et l’entraîna.

Ce fut chez eux seulement qu’ils sentirent le vide en revoyant le lit du gars, ses vêtements, sa pipe… Dieu ! qu’elle était vaste, la petite maison où ils avaient tenu sept au temps où les cinq enfants se serraient là, bien en vie, près des parents. La mer en avait tué deux d’abord, puis entraîné deux autres, et il ne restait plus que P’tit Pierre, leur dernier, auquel les Bernard s’accrochèrent plus fortement en sentant la vieillesse leur peser aux épaules.

— Il s’ra toujours pas marin, çui-là ! déclara la mère.

Et le père ne répondit pas, parce qu’il pensait comme sa femme, mais qu’un homme ne doit jamais se montrer faible.

P’tit Pierre avait dix ans, mais il en paraissait douze par le développement de la taille et des membres. Son nez large et le menton de galoche qui allongeait sa figure, lui mettait au visage la marque des Bernard. Une cicatrice lui barrait le sourcil droit depuis qu’il avait plongé sur une ancre. Izacar, qui le ramassa ce jour-là, les yeux noyés de sang, l’avait cru aveugle.

Au mépris de l’école qu’il manquait le plus souvent possible, P’tit Pierre galopait, avec les gouspins du village, par le vent tonique et le soleil qui tanne. À mer basse, c’étaient des parties