Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/211

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de pêche, la culotte troussée jusqu’aux fesses ; des rafles de moules, de patelles, de palourdes, humées séance tenante, toutes juteuses d’eau salée ; des chasses aux crabes ou aux mulets, traqués dans les mares, empoignés et martyrisés avec des cris de victoire. À mer haute, c’étaient des embarquements à pleins canots, des défis à la godille, et les navigations hasardeuses des petits bateaux remorqués à la ficelle.

Sa force et son adresse classaient P’tit Pierre premier à la lutte et au jeu. Il levait les quartiers de roches sous lesquels sont tapis les tourteaux gourds, et savait, comme d’un coup de bec, saisir à la pointe d’un couteau l’anguille furtive. Alors que les petits s’attelaient par deux aux lourds avirons de quinze pieds, il les maniait seul, orgueilleusement. Et en se baignant, tout nu dans la lumière, il aimait, par plaisanterie de maître, éclabousser les filles qui, le jupon ramassé entre les jambes, s’enfuyaient au bord de la mer, à grand renfort de criailleries.

Profitant de ses loisirs, Bernard conduisit désormais son gars à l’école, qui est au-dessus de l’église, en haut du village, et fut le chercher le soir vers quatre heures. Il fallait en finir avec la dissipation. Une surveillance s’imposait, à la fois pour le garder de mauvaises fréquentations et le distraire du port. Bernard institua des promenades congruentes