Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/231

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filles, des goulées de baisers à prendre, des litres à lamper, là où les instincts trouvaient leur compte large de plaisir.

Les jetées grouillaient de monde. Déjà les régates couvraient de voiles l’estuaire trouble. La Loire immense roulait vers la mer ses eaux vaseuses avec des remous et du clapotis. Le courant fuyait en emportant les barques et bouillonnait le long des cales. Le bas des quais, enduit de végétation grasse, sentait fortement la marée. Le père Clémotte abandonné aux amitiés d’un vieux pilote, Florent entraîna P’tit Pierre du côté des estacades où il y avait des joutes pour les marins de la Flotte.

Une quinzaine d’embarcations de service s’alignent sur deux rangs. Il y en a de petites à huit rameurs et de grandes à seize. De loin elles ressemblent à des bêtes, blanches et bleues, fournies de pattes à cause des avirons que les hommes tiennent bordés au ras de l’eau, prêts à partir. À l’arrière le patron est debout, une main sur la barre.

À terre, des gens enflés de supériorité expliquent les choses mystérieuses de la mer. Des vieilles barbes parlent un langage semé de mots inconnus : tribord amure, flèche bômé, lof pour lof… La foule regarde d’un seul œil les barques, souquées de toile, qui se croisent, se coupent