Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/143

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faction croissante. Vous savez qu’il est d’une très bonne famille…

— Non, il ne m’a pas fait valoir cet avantage.

— Quelle étrange fille vous êtes, Mary ! Mais comment est-il de sa personne ? dépeignez-le-moi.

— Comment peut-on dépeindre un homme ? Voici, si vous y tenez, un inventaire de sa personne : des sourcils épais, des yeux noirs, le nez droit, des cheveux noirs et abondants, les mains grandes, fortes, blanches et… voyons… qu’a-t-il encore ?… Ah ! oui, un délicieux mouchoir de batiste. Mais vous le verrez, du reste. Vous savez que c’est à peu près le moment de sa visite.

Rosemonde rougit légèrement, puis ajouta d’un air pensif :

— J’aime assez les manières hautaines, je ne puis souffrir les jeunes gens communicatifs.

— Je n’ai pas dit que M. Lydgate fut hautain, mais il y en a pour tous les goûts, comme disait notre petite Mamselle française ; et, s’il est permis à une jeune fille de choisir le genre de vanité qui lui plaît, il me semble que c’est bien à vous, Rosy.

— Le dédain n’est pas de la vanité. Un vaniteux, c’est Fred.

— Je voudrais que personne ne dît jamais pire que cela de lui. Il ferait bien d’être un peu plus sur ses gardes. Mistress Waule a été dire à mon oncle que Fred était très peu rangé.

Mary parlait comme emportée par une impulsion de jeunesse qui faisait taire son jugement. Un certain malaise s’associait pour elle à ces mots peu rangé, et elle espérait que la réponse de Rosemonde pourrait peut être le dissiper. Mais elle se garda cependant de mentionner l’insinuation plus précise de mistress Waule.

— Oh ! Fred est abominable ! dit Rosemonde.