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CHAPITRE V


Le révérend Camden Farebrother, que Lydgate alla voir le lendemain soir, habitait un vieux presbytère assez vénérable dans ses murs de pierre pour faire un digne pendant à l’église, située vis-à-vis. Le mobilier de la maison était vieux aussi, mais d’une autre époque. Il venait du père et du grand-père de Farebrother. C’étaient des chaises peintes en blanc avec des dorures à festons et des restes de damas de soie rouge portant de longues déchirures ; des portraits gravés de lords chanceliers et de légistes célèbres du dernier siècle se réfléchissant dans un miroir antique ; des petites tables de marqueterie et des sofas ressemblant à d’inconfortables chaises longues ; tout cela se détachant sur la boiserie sombre. Telle était la physionomie du salon dans lequel Lydgate fut introduit et où se trouvaient, pour le recevoir, trois dames également à la mode antique et ayant chacune dans leur personne un caractère de dignité suranné mais naturel : mistress Farebrother, la mère du vicaire, qui n’avait pas encore atteint soixante-dix ans, coiffée et ajustée avec une recherche de propreté minutieuse, encore droite sous ses cheveux blancs, au regard prompt et vif ; miss Noble, sa sœur, petite vieille d’un aspect plus doux et dont le bonnet et le jabot étaient à coup sur plus usés et plus raccommodés que ceux de mistress Farebrother ; enfin, miss Winifred Farebrother, la sœur aînée du vicaire, de bonne mine comme lui, mais flétrie et soumise comme le sont généralement les femmes qui passent leur vie sans se marier sous le joug ininterrompu de leurs parents. Lydgate ne s’était pas attendu à rencontrer une société si particulière ; sachant