Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/486

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raissait plus sage de conserver une attitude passive que d’essayer une fuite ridicule, poursuivi par un braillard ivre.

— Je ne suis ni plus gris que vous ni même autant, dit Dagley. Je supporte ma boisson, et je sais ce que je veux dire : et je veux dire que le roi y mettra fin ; car ceux qui le savent disent qu’il y aura une réforme, et que certains propriétaires, qui n’ont jamais fait ce qu’ils devaient pour leurs tenanciers, seront traités de telle sorte qu’ils auront à tourner les talons au plus vite. Et il y en a, à Middlemarch, qui savent ce que c’est que la réforme et lesquels tourneront les talons. Ils disent « Nous savons qui est votre landlord, c’en est un qui a la main serrée. Il est pour la réforme ! » Voilà ce qu’ils disent, et j’ai démêlé ce que c’était que la réforme, et elle vous fera tourner les talons à vous et à vos pareils, et avec des projectiles qui sentiront pas mal fort, je vous le dis. Et vous pouvez faire ce qui vous plaît maintenant, je n’ai pas peur de vous, et vous feriez mieux de laisser mon garçon en paix et de vous occuper de vos affaires avant d’avoir la réforme sur le dos, voilà ce que j’avais à dire, conclut M. Dagley enfonçant sa fourche dans le sol avec une vigueur qui lui parut de trop, lorsqu’il voulut l’en retirer.

La-dessus, Monk se mit à aboyer avec force et ce fut pour M. Brooke l’instant de s’échapper. Il sortit de la cour le plus rapidement possible, non sans un certain étonnement de la nouveauté de sa situation. Jamais encore il n’avait été insulté sur ses propres terres, s’étant toujours cru volontiers le favori de chacun. Ne sommes-nous pas tous plus ou moins disposés à avoir cette opinion de nous-mêmes, quand nous songeons à notre amabilité plutôt qu’à ce que les autres peuvent attendre de nous ?