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VIERGES EN FLEUR

la main des bouquets de bruyères et de fleurs des champs.

L’abbé Le Manach, qui avait assisté plusieurs fois à ce genre de fêtes, expliqua aux baigneurs que le vainqueur de la course choisissait en arrivant, parmi les villageoises, celle qu’il préférait, qu’il cueillait à la fois un baiser et des fleurs.

Le signal fut donné par la détonation d’une canardière. Et ce fut aussitôt une bousculade effroyable.

Les coureurs, à coups de poing, écartaient leurs rivaux. Leurs pas s’enlizaient dans les sables mous. Des jeunes gens roulaient, hurlaient de rage. Les filles, silencieuses et pâles, frémissaient : les efforts et les cris de ces mâles robustes étaient un hommage à leur beauté.

Philbert considérait les petites Bretonnes. Entre toutes, une seule était vraiment jolie, avec ses grands yeux glauques, semblables à la mer profonde et mystérieuse, avec ses lourds cheveux, roux comme les granits, roulés en auréole autour de la coiffe de dentelles blanches.

— Hé ! hé ! mon coquin, dit M. Houdet, voilà de la jeunesse, de la chair fraîche. Ma parole, vous les grignotez presque et les mangez des yeux…

— Le régal en effet me tente, je l’avoue.

— Oui, c’est gentil, c’est frais, mais il ne fau-