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LA CONQUÊTE DE PLASSANS.

Et il développa tout un plan. M. Maffre, peu à peu, comprenait, hochait la tête, disant :

— Parfait, parfait… Ce serait le digne pendant de l’œuvre de la Vierge. Ah ! monsieur le curé, il faut mettre à exécution un si beau projet.

— Eh bien ! conclut le prêtre en le reconduisant jusque dans la rue, puisque l’idée vous semble bonne, dites-en un mot à vos amis. Je verrai M. Delangre, je lui en parlerai également… Dimanche, après les vêpres, nous pourrions nous réunir à la cathédrale, pour prendre une décision.

Le dimanche, M. Maffre amena M. Rastoil. Ils trouvèrent l’abbé Faujas et M. Delangre dans une petite pièce attenante à la sacristie. Ces messieurs se montraient très-enthousiastes. En principe, la création d’un cercle de jeunes gens fut résolue ; seulement, on batailla quelque temps sur le nom que ce cercle porterait. M. Maffre voulait absolument qu’on le nommât le cercle de Jésus.

— Eh ! non, finit par s’écrier le prêtre impatienté ; vous n’aurez personne, on se moquera des rares adhérents. Comprenez donc qu’il ne s’agit pas de mettre quand même la religion dans l’affaire ; au contraire, je compte bien laisser la religion à la porte. Nous voulons distraire honnêtement la jeunesse, la gagner à notre cause, rien de plus.

Le juge de paix regardait le président d’un air si étonné, si anxieux, que M. Delangre dut baisser le nez pour cacher un sourire. Il tira sournoisement la soutane de l’abbé. Celui-ci, se calmant, reprit avec plus de douceur :

— J’imagine que vous ne doutez pas de moi, messieurs. Laissez-moi, je vous en prie, la conduite de cette affaire. Je propose de choisir un nom tout simple, par exemple celui-ci : le cercle de la Jeunesse, qui dit bien ce qu’il veut dire.

M. Rastoil et M. Maffre s’inclinèrent, bien que cela leur