Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/199

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Jusqu’au milieu de mai, Pascal et Clotilde s’enfermèrent ainsi, sans même franchir le seuil de leur retraite. Un matin, comme elle s’attardait au lit, il disparut, rentra une heure plus tard ; et, l’ayant retrouvée couchée, dans son joli désordre, les bras nus, les épaules nues, il lui mit aux oreilles deux brillants, qu’il venait de courir acheter, en se rappelant que l’anniversaire de sa naissance tombait ce jour-là. Elle adorait les bijoux, elle fut surprise et ravie, elle ne voulut plus se lever, tellement elle se trouvait belle, ainsi dévêtue, avec ces étoiles au bord des joues. À partir de ce moment, il ne se passa pas de semaine, sans qu’il s’évadât de la sorte une ou deux fois, le matin, pour rapporter quelque cadeau. Les moindres prétextes lui étaient bons, une fête, un désir, une simple joie. Il profitait de ses jours de paresse, s’arrangeait de façon à être de retour, avant qu’elle se levât et il la parait lui-même, au lit. Ce furent, successivement, des bagues, des bracelets, un collier, un diadème mince. Il sortait les autres bijoux, il se faisait un jeu de les lui mettre tous, au milieu de leurs rires. Elle était comme une idole, le dos contre l’oreiller, assise sur son séant, chargée d’or, avec un bandeau d’or dans ses cheveux, de l’or à ses bras nus, de l’or à sa gorge nue, toute nue et divine, ruisselante d’or et de pierreries. Sa coquetterie de femme en était délicieusement satisfaite, elle se laissait aimer à genoux, en sentant bien qu’il y avait seulement là une forme exaltée de l’amour. Pourtant, elle commençait à gronder un peu, à lui faire de sages remontrances, car ça devenait absurde, en somme, ces cadeaux, qu’elle devait serrer ensuite au fond d’un tiroir, sans jamais s’en servir, n’allant nulle part. Ils tombaient à l’oubli, après l’heure de contentement et de gratitude qu’ils leur procuraient, dans leur nouveauté. Mais lui ne l’écoutait pas, emporté par cette véritable folie du don,