Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/283

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elle. La scène se reconstruisait, il la voyait poursuivie, salie de gros mots. Puis, il balbutia :

— C’est ma faute, c’est par moi que tu souffres… Écoute, nous nous en irons, loin, très loin, quelque part où l’on ne nous connaîtra pas, où l’on te saluera, où tu seras heureuse.

Mais, bravement, dans un effort, en le voyant pleurer, elle s’était remise debout, elle rentrait ses larmes.

— Ah ! c’est lâche, ce que je viens de faire là ! Moi qui m’étais tant promis de ne te rien dire ! Et puis, quand je me suis retrouvée chez nous, ç’a été un tel déchirement, que tout m’est sorti du cœur… Tu vois, c’est fini, ne te chagrine pas… Je t’aime…

Elle souriait, elle l’avait repris doucement dans ses bras, elle le baisait à son tour, ainsi qu’un désespéré, dont on endort la souffrance.

— Je t’aime, et je t’aime tant, que cela me consolerait de tout ! Il n’y a que toi au monde, qu’importe ce qui n’est pas toi ! Tu es si bon, tu me rends si heureuse !

Mais il pleurait toujours, et elle se remit à pleurer, et ce fut longtemps une tristesse infinie, une détresse où se mêlaient leurs baisers et leurs larmes.

Pascal, resté seul, se jugea abominable. Il ne pouvait faire davantage le malheur de cette enfant qu’il adorait. Et, le soir du même jour, un événement se produisit, qui lui apporta enfin le dénouement, cherché jusque-là, avec la terreur de le trouver. Après le dîner, Martine l’emmena à l’écart, en grand mystère.

— Madame Félicité, que j’ai vue, m’a chargée de vous communiquer cette lettre, monsieur ; et j’ai la commission de vous dire qu’elle vous l’aurait apportée elle-même, si sa bonne réputation ne l’empêchait de revenir ici… Elle vous prie de lui renvoyer la lettre de monsieur Maxime, en lui faisant connaître la réponse de mademoiselle.