Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/298

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avoir emporté la victoire, de haute lutte. On était au vendredi, et il fut entendu que Clotilde partirait le dimanche. Une dépêche fut même envoyée à Maxime.

Depuis trois jours déjà, le mistral soufflait. Mais, le soir, il redoubla, avec une violence nouvelle ; et Martine annonça qu’il durerait au moins trois jours encore, suivant la croyance populaire. Les vents de la fin septembre, au travers de la vallée de la Viorne, sont terribles. Aussi eut-elle le soin de monter dans toutes les chambres, pour s’assurer que les volets étaient solidement clos. Quand le mistral soufflait, il prenait la Souleiade en écharpe, par-dessus les toitures de Plassans, sur le petit plateau où elle était bâtie. Et c’était une rage, une trombe furieuse, continue, qui flagellait la maison, l’ébranlait des caves aux greniers, pendant des jours, pendant des nuits, sans un arrêt. Les tuiles volaient, les ferrures des fenêtres étaient arrachées ; tandis que, par les fentes, à l’intérieur, le vent pénétrait, en un ronflement éperdu de plainte, et que les portes, au moindre oubli, se refermaient avec des retentissements de canon. On aurait dit tout un siège à soutenir, au milieu du vacarme et de l’angoisse.

Le lendemain, ce fut dans cette maison morne, secouée par le grand vent, que Pascal voulut s’occuper, avec Clotilde, des préparatifs du départ. La vieille madame Rougon ne devait revenir que le dimanche, au moment des adieux. Quand Martine avait appris la séparation prochaine, elle était restée saisie, muette, les yeux allumés d’une courte flamme ; et, comme on l’avait renvoyée de la chambre, en disant qu’on se passerait d’elle, pour les malles, elle était retournée dans sa cuisine, elle s’y livrait à ses besognes ordinaires, en ayant l’air d’ignorer la catastrophe qui bouleversait leur ménage à trois. Mais, au moindre appel de Pascal, elle accourait si prompte, si leste, le visage si clair, si ensoleillé par son zèle à le