Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/302

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s’habiller tout de suite ; et un nouvel accès venait de l’abattre, pris de vertiges, étouffé par des palpitations.

Il était à peine sorti d’une courte syncope, qu’il recommença à bégayer sa torture.

— Non, non ! je ne peux pas, je souffre trop… J’aime mieux mourir, mourir maintenant…

Pourtant, il reconnut Martine, et il s’abandonna, il se confessa devant elle, à bout de force, noyé et roulé dans la douleur.

— Ma pauvre fille, je souffre trop, mon cœur éclate… C’est elle qui emporte mon cœur, qui emporte tout mon être. Et je ne peux plus vivre sans elle… J’ai failli mourir cette nuit, je voudrais mourir avant son départ, pour ne pas avoir ce déchirement de la voir me quitter… Oh ! mon Dieu ! elle part, et je ne l’aurai plus, et je reste seul, seul, seul…

La servante, si gaie en montant, était devenue d’une pâleur de cire, le visage dur et douloureux. Un instant, elle le regarda arracher les draps de ses mains crispées, râler son désespoir, la bouche collée à la couverture. Puis, elle parut se décider, d’un brusque effort.

— Mais, monsieur, il n’y a pas de bon sens à se faire un chagrin pareil. C’est ridicule… Puisque c’est comme ça, et que vous ne pouvez pas vous passer de mademoiselle, je vais aller lui dire dans quel état vous vous êtes mis…

Violemment, cette phrase le fit se relever, chancelant encore, se retenant au dossier d’une chaise.

— Je vous le défends bien, Martine !

— Avec ça que je vous écouterais ! Pour vous retrouver à demi mort, pleurant toutes vos larmes !… Non, non ! c’est moi qui vais aller chercher mademoiselle, et je lui dirai la vérité, et je la forcerai bien à rester avec nous !