Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/303

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Mais il lui avait empoigné le bras, il ne la lâchait plus, pris de colère.

— Je vous ordonne de vous tenir tranquille, entendez-vous ? ou vous partirez avec elle… Pourquoi êtes-vous entrée ? J’étais malade, à cause de ce vent. Ça ne regarde personne.

Puis, envahi d’un attendrissement, cédant à sa bonté ordinaire, il finit par sourire.

— Ma pauvre fille, voilà que vous me fâchez ! Laissez-moi donc agir comme je le dois, pour le bonheur de tous. Et pas un mot, vous me feriez beaucoup de peine.

Martine, à son tour, retint de grosses larmes. Il était temps que l’entente se fit, car Clotilde entra presque aussitôt, levée de bonne heure, ayant la hâte de revoir Pascal, espérant sans doute, jusqu’au dernier moment, qu’il la retiendrait. Elle avait elle-même les paupières lourdes d’insomnie, elle le regarda tout de suite, fixement, de son air d’interrogation. Mais il était si défait encore, qu’elle s’inquiéta.

— Non, ce n’est rien, je t’assure, j’aurais même bien dormi, sans le mistral… N’est-ce pas ? Martine, je vous le disais.

La servante, d’un signe de tête, lui donna raison. Et Clotilde, elle aussi, se soumettait, ne lui criait pas sa nuit de lutte et de souffrance, pendant qu’il agonisait de son côté. Les deux femmes, dociles, ne faisaient plus qu’obéir et l’aider, dans son oubli de lui-même.

— Attends, reprit-il en ouvrant son secrétaire, j’ai là quelque chose pour toi… Tiens ! Il y a sept cents francs dans cette enveloppe…

Et, bien qu’elle se récriât, qu’elle se défendît, il lui rendit des comptes. Sur les six mille francs de bijoux, à peine deux cents étaient dépensés, et il en gardait cent, pour aller jusqu’à la fin du mois, avec la stricte écono-