qu’on imprimait déjà ses affiches et ses bulletins. Dans le premier moment, la colère l’étouffait au point qu’il voulait se présenter quand même.
— Ah ! si vous ne nous aviez pas écrit, dit Du Poizat en se tournant vers Rougon, nous aurions donné une fameuse leçon au gouvernement !
Rougon haussa les épaules. Il répondit négligemment, pendant qu’il battait ses cartes :
— Vous auriez échoué et vous restiez à jamais compromis. La belle avance !
— Je ne sais pas comment vous êtes bâti, vous ! cria Du Poizat, qui se mit brusquement debout, avec des gestes furibonds. Moi, je déclare que le Marsy commence à m’échauffer les oreilles. C’est vous qu’il a voulu atteindre en frappant notre ami Kahn… Avez-vous lu les circulaires du personnage ? Ah ! elles sont propres, ses élections ! Il les a faites à coups de phrases… Ne souriez donc pas ! Si vous aviez été à l’Intérieur, vous auriez mené l’affaire d’une façon autrement large.
Et, comme Rougon continuait à sourire en le regardant, il ajouta avec plus de violence :
— Nous étions là-bas, nous avons tout vu… Il y a un malheureux garçon, un ancien camarade à moi, qui a osé poser une candidature républicaine. Vous n’avez pas idée de la façon dont on l’a traqué. Le préfet, les maires, les gendarmes, toute la clique est tombée sur lui ; on lacérait ses affiches, on jetait ses bulletins dans les fossés, on arrêtait les quelques pauvres diables chargés de distribuer ses circulaires ; jusqu’à sa tante, une digne femme pourtant, qui l’a fait prier de ne plus mettre les pieds chez elle, parce qu’il la compromettait. Et les journaux donc ! il y était traité de brigand. Les bonnes femmes se signent maintenant, quand il passe dans un village.