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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

voix, descendant du ton solennel au ton familier, bredouilla rapidement :

— « Nous vous proposons, messieurs, l’adoption pure et simple du projet de loi tel qu’il a été présenté par le Conseil d’État. »

Et il s’assit, au milieu d’une grande rumeur.

— Très-bien ! très-bien ! criait toute la salle.

Des bravos éclatèrent. M. de Combelot, dont l’attention souriante ne s’était pas démentie une minute, lança même un : Vive l’empereur ! qui se perdit dans le bruit. Et l’on fit presque une ovation au colonel Jobelin, debout au bord de la tribune où il était seul, s’oubliant à applaudir de ses mains sèches, malgré le règlement. Toute l’extase des premières phrases reparaissait avec un débordement nouveau de congratulations. C’était la fin de la corvée. D’un banc à un autre, on échangeait des mots aimables, pendant qu’un flot d’amis se précipitaient vers le rapporteur, pour lui serrer énergiquement les deux mains.

Puis, dans le tumulte, un mot domina bientôt.

— La délibération ! la délibération !

Le président, debout au bureau, semblait attendre ce cri. Il donna un coup de sonnette, et dans la salle subitement respectueuse, il dit :

— Messieurs, un grand nombre de membres demandent qu’on passe immédiatement à la délibération.

— Oui, oui, appuya d’une seule clameur la Chambre entière.

Et il n’y eut pas de délibération. On vota tout de suite. Les deux articles du projet de loi, successivement mis aux voix, furent adoptés par assis et levé. À peine le président achevait-il la lecture de l’article, que, du haut en bas des gradins, tous les députés se levaient d’un bloc, avec un grand remuement de pieds, comme soule-