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Nous en parlerons plus particulièrement, en traitant l’art du marbrier.

De la brique en général.

La brique est une espèce de pierre artificielle, dont l’usage est très-nécessaire dans la construction des bâtimens. Non-seulement on s’en sert avantageusement au lieu de pierre, de moellon ou de plâtre, mais encore il est de certains genres de construction qui exigent de l’employer préférablement à tous les autres matériaux, comme pour des voûtes légères, qui exigent des murs d’une moindre épaisseur pour en retenir la poussée, pour des languettes ou cloisons de cheminées, des contrecœurs, des foyers, &c.

Nous avons vu ci-devant que cette pierre étoit rougeâtre & qu’elle se jetoit en moule ; nous allons voir maintenant de quelle manière elle se fabrique, connoissance d’autant plus nécessaire, que, dans de certains pays, il ne s’y trouve souvent point de carrières à pierre ni à plâtre, & que par-là on est forcé de faire usage de brique, de chaux & de sable.

De la terre propre à faire de la brique.

La terre la plus propre à faire de la brique, est communément appelée terre glaise ; la meilleure doit être de couleur grise ou blanchâtre, grasse, sans graviers ni cailloux, étant plus facile à corroyer. Ce soin étoit recommandé par Vitruve, en parlant de celles dont les anciens se servoient pour les cloisons, murs, planchers, &c. qui étoient mêlées de foin & de paille hachés, & point cuites, mais seulement séchées au soleil pendant quatre ou cinq ans, parce que, disoit-il, elles se fendent & se détrempent lorsqu’elles sont mouillées à la pluie.

La terre qui est rougeâtre est beaucoup moins estimée pour cet usage, les briques qui en sont faites étant plus sujettes à se feuilleter & à se réduire en poudre à la gelée.

Vitruve prétend qu’il y a trois sortes de terres propres à faire de la brique ; la première, qui est aussi blanche que de la craie ; la seconde, qui est rouge ; & la troisième, qu’il appelle sablon mâle.

Au rapport de Perrault, les interprètes de Vitruve n’ont jamais pu décider quel étoit ce sablon mâle dont il parle, & que Pline prétend avoir été employé de son temps pour faire de la brique. Philander pense que c’est une terre solide & sablonneuse ; Barbaro dit que c’est un sable de rivière gras que l’on trouve en pelotons, comme l’encens mâle : & Baldus rapporte qu’il a été appelé mâle, parce qu’il étoit moins aride que l’autre sable. Au reste, sans prendre garde scrupuleusement à la couleur, on reconnoîtra qu’une terre est propre à faire de bonnes briques, si après une petite pluie on s’apperçoit qu’en marchant dessus elle s’attache aux pieds & s’y amasse en grande quantité, sans pouvoir la détacher facilement, ou si en la pétrissant dans les mains on ne peut la diviser sans peine.

De la manière de faire la brique.

Après avoir choisi un espace de terre convenable ; & l’ayant reconnu également bonne par-tout, il faut l’amasser par monceaux & l’exposer à la gelée à plusieurs reprises, ensuite la corroyer avec la houe ou le rabot, & la laisser reposer alternativement jusqu’à quatre ou cinq fois. L’hiver est d’autant plus propre pour cette préparation, que la gelée contribue beaucoup à la bien corroyer

On y mêle quelquefois de la bourre & du poil de bœuf pour la mieux lier, ainsi que du sablon, pour la rendre plus dure & plus capable de résister au fardeau lorsqu’elle est cuite. Cette pâte faite, on la jette par mottes dans des moules faits de cadres de bois, de la même dimension qu’on veut donner à la brique ; & lorsqu’elle est à demi sèche, on lui donne, avec le couteau, la forme que l’on juge à propos.

Le temps le plus propre à la faire sécher, selon Vitruve, est le printemps & l’automne, ne pouvant sécher en hiver, & la grande chaleur de l’été la séchant trop promptement à l’extérieur, ce qui la fait fendre, tandis que l’intérieur reste humide.

Il est aussi nécessaire, selon lui, en parlant des briques crues, de les laisser sécher pendant deux ans, parce qu’étant employées nouvellement faites, elles se resserrent & se séparent à mesure qu’elles se sèchent : d’ailleurs, l’enduit qui les retient ne pouvant plus se soutenir, se détache & tombe ; & la muraille s’affaissant de part & d’autre inégalement, fait périr l’édifice.

Le même auteur rapporte encore que, de son temps, dans la ville d’Utique, il n’étoit pas permis de se servir de brique pour bâtir avant qu’elle eût été visitée par le magistrat, & qu’on eut été sûr qu’elle avoit séché pendant cinq ans. On se sert encore maintenant de briques crues, mais ce n’est que pour les fours à chaux, à tuile ou à brique.

La meilleure brique est celle qui est d’un rouge pâle tirant sur le jaune, d’un grain serré & compacte, & qui, lorsqu’on la frappe, rend un son clair & net. Il arrive quelquefois que les briques faites de même terre & préparées de même, sont plus ou moins rouges les unes que les autres, lorsqu’elles sont cuites, & par conséquent de différente qualité : ce qui vient des endroits où elles ont été placées dans le four, & où le feu a eu plus ou moins de force pour les cuire. Mais la preuve la plus certaine pour connoître la meilleure, sur-tout pour des édifices de quelque importance, est de l’exposer à l’humidité & à la gelée pendant l’hiver, parce que celles qui y auront résisté sans se feuilleter, & auxquelles il ne sera arrivé aucun inconvénient considérable, pourront être mises en œuvre en toute sûreté.

Autrefois on se servoit à Rome de trois sortes de

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