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norité de Louis XV : on accorde le même titre aux princesses douairières des princes qualifiés : les princes des maisons de Condé & de Conti sont seulement appellés altesses sérénissimes.

On ne doit point donner le titre d’altesse royale à monseigneur le dauphin, à cause du grand nombre de princes qui le prennent ; cependant Louis XIV approuva les cardinaux qui, en écrivant à monscigneurle dauphin, le trairoient de sérénissime altesse royale, parce que les italiens ne peuvent pas s’accoutumer au style simple ; & qu’après le titre de majesté, il n’y en a point de plus relevé que celui d’altesse royale.

La czarine Elisabeth, en désignant pour son successeur au trône de Russie le prince de Holstein, lui donna le titre d’altesse impériale.

Les princes de la maison de Rohan prennent aussi le titre d’altesse ; & ceux d’entre eux qui sont cardinaux, tels que M. le cardinal de Soubise ; évêque de Strasbourg, prennent le titre d’altesse éminentissime.

ALT-RANSTADT, nous parlerons du traité d’Alt-Ranstadt à l’article Traité.

AMBASSADE, s. f. c’est l’emploi d’une personne envoyée par un prince ou par un état indépendant à un autre prince ou à un autre état. Le dictionnaire de Jurisprudence a traité fort en détail ce qui regarde les ambassades & les ambassadeurs ; afin d’éviter les répétitions, nous ne donnerons ici que le supplément à cet article[1].

L’usage des ambassades est aussi ancien que l’établissement des sociétés civiles. Autrefois toutes les ambassades étoient extraordinaires ; elles avoient pour but des négociations instantes, & les ambassadeurs ne demeroient dans les cours étrangères que jusqu’à ce qu’ils les eussent achevées. On ne connoissoit point les ambassades ordinaires ; car on ne doit point appeller de ce nom l’ambassade libre ou honoraire chez les romains, dont il sera parlé dans la suite, puisque ce n’étoit qu’une marque de distinction dont on décoroit des personnes d’un certain rang.

L’époque des ambassades ordinaires ne remonte guères au-delà de deux cens ans. Raymond de Beccaria, baron de Forquevaux, de Pavie, & chevalier de l’ordre de S. Michel, fut un des premiers ministres qui résidèrent dans les cours étrangères. Il fut envoyé en Espagne, en 1565, en qualité d’ambassadeur du roi de France Charles IX auprès de Philippe II, vraisemblablement à cause de la mésintelligence qui régnoit entre Philippe & Elisabeth de France sa seconde femme ; il y demeura jusqu’à la mort de cette princesse, dont il parle beaucoup dans ses mémoires conservés parmi les manuscrits de la bibliothèque du Roi à Paris.

La Pologne a adopté si tard les ambassades ordinaires, que, dans les diètes de 1666 & de 1668, les nonces des palatinats demandoient qu’on congédiât tous les ambassadeurs, & qu’on réglât le séjour qu’ils pourroient faire en Pologne.

À la fin du dernier siècle, il n’y avoit point encore eu de correspondance entre la France & la Russie. Jamais les rois très-chrétiens n’avoient envoyé de ministres aux czars ; & ceux qui étoient venus de Russie en France, étoient presque tous, malgré leurs titres, des négocians qui obtenoient des lettres de créance de leur maître, pour vendre leurs marchandises dans ce royaume.

Les ambassades ordinaires sont aujourd’hui communes dans presque tous les états ; (je dis presque tous, car les suisses & les turcs n’envoient que des ambassades extraordinaires.) Ce nouvel usage n’empêche pas que les princes n’envoient, lorsqu’ils le jugent à propos, des ambassadeurs extraordinaires dans les cours même où ils en ont d’ordinaires.

Les ambassades extraordinaires sont communément très-brillantes & composées de plusieurs personnes ; mais elles étoient autrefois beaucoup plus nombreuses. Les athéniens envoyèrent dix ambassadeurs à Philippe, père d’Alexandre, pour lui demander la paix ; les sambartes, nation des Indes, en envoyèrent cinquante à Alexandre ; les amphictions, quinze ; & les scythes, vingt ; Alexandre en envoya cinquante au sénat des maniciens ; les carthaginois en envoyèrent trente à Tyr, assiégée par Alexandre ; les romains en envoyèrent deux à Annibal qui assiégeoient Sagonte, les carthaginois en envoyèrent trente à Scipion ;

  1. Nous avons un assez grand nombre d’ouvrages qui traitent des ambassades & des ambassadeurs ; il seroit superflu de les nommer tous. Voci les principaux :
    El Emhaxador, par Antoine de Vera.
    De Legationibus par Alberic Gentilis.
    Legatus, par Charles Pascal.
    De la Charge & de la Dignité de l’Ambassadeur, par Jean Hotman.
    Legatus, par Frédéric de Marselaer.
    L’Arnbasciatore politice christiano, par le prince Charles-Marie Carafe.
    De Jure belli & pacis, par Grotius.
    L’Ambassadeur, & ses fonctions, par Wicquefort.
    De la manière de négocier avec les Souverains, &c. par Callieres.
    De Foro Legatorum, par Bynkershoek, traduit en françois par Barbeyrac ; sous le titre de Traité du Juge compétent des Ambassadeurs, tant pour le civil que pour le criminel.
    Discours sur l’art de négocier, par Pecquet.
    Le Ministre public dans les Cours étrangères, &c. par J. de la Sarraz du Fran-Quesnay.
    Principes de négociations, par M. l’abbé de Mably.
    La Science du gouvernement, par M. de Réal ; tom. 6.