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Comme dans le droit civil, un juge délégué ne peut subdéléguer, dans le droit des gens un ambassadeur ne peut substituer un autre ambassadeur à sa place.

Les régens, qui gouvernent les états monarchiques pendant la minorité des rois, n’ont pas eux-mêmes le droit d’ambassade. L’administration publique se fait alors au nom du roi mineur, & celui qui en est le dépositaire, l’exerce dans toute sa plénitude ; mais l’autorité du régent n’est qu’emprunté : les ambassadeurs qu’il envoie ne sont pas les siens, ce sont ceux du roi.

Wicquefort dit que, si plusieurs concurrens réclament le trône, les états du royaume peuvent envoyer en leur nom des ambassadeurs, parce qu’ils ont dans leurs mains l’autorité publique.

Le roi meurt, mais la nation ne meurt pas. La puissance souveraine doit nécessairement résider sur la tête de quelqu’un. Pendant les interrègnes, dans les monarchies électives, le primat, les sénateurs, les états généraux, ceux enfin qui sont revêtus de l’autorité publique, ont incontestablement le droit d’ambassade.

Il y a de petits princes qui n’ont ni rang ni séance parmi les autres souverains, & qui n’ont aucun caractère de souveraineté, hors du territoire de leur domination. Ces Princes ne peuvent avoir ni ambassadeurs ni envoyés ni ministres publics. Ils ne jouissent pas, non plus que leurs députés, des privilèges que le droit des gens accorde aux princes étrangers & à leurs ministres. Les distinctions qu’obtiennent les princes souverains hors de leurs états, dépendent de leur puissance ; & les princes dont il est ici question, sont comptés pour rien dans le corps diplomatique.

Les villes dont l’alliance anséatique étoit composée, n’étoient pas souveraines, mais municipales, & dépendantes des princes, & elles n’avoiënt pas droit d’ambassade.

Comme il est très-difficile de trouver des sujets propres aux négociations, le roi de Prusse a fait un établissement que les états, jaloux d’avoir des négociateurs capables de ménager habilement leurs intérêts, peuvent imiter. Il a créé dix conseillers d’ambassade, attachés au département des affaires étrangères. On choisit pour eet emploi des jeunes gens de condition, qui ont de la fortune, qui viennent d’achever leurs études, & qui montrent des dispositions avantageuses pour les affaires publiques. On leur assigne une pension modique, qui leur sert d’encouragement, & on avance ceux qui donnent des preuves d’application, de zèle, de discrétion, & de talent. On les admet aux conférences sur les affaires courantes, on leur communique quelques dépêches des ministres étrangers, on les charge de dresser des instructions ou de quelqu’autre travail. Leur ouvrage est revu & corrigé par un des conseillers ou secrétaires d’état, qui leur sert de guide.

Tout ce qui regarde les ambassades & les ambassadeurs, est traité avec beaucoup d’étendue dans le Dictionnaire Universel des sciences morales, économiques, politiques & diplomatiques, publié par M. Robinet.

AMBASSADEUR. L’ambassadeur est un ministre public, qu’un souverain envoie dans une cour étrangère pour y représenter sa personne. Voyez Ministre public.

Ce mot vient de ambasciator, terme de la basse latinité ; ambasciator dérive de ambactus, ou ambact, vieux mot emprunté du gaulois, qui signifie serviteur, client, domestique ou officier, selon Borel, Ménage & Chifflet, d’après Saumaise & Spelman : mais les jésuites d’Anvers, dans les actes sanct. Mart. tom. II, p. 128, rejettent cette opinion, parce que l’ambact des gaulois avoit cessé d’être en usage long-temps avant qu’on sc servît du mot latin ambascia ; cette assertion n’est pas strictement vraie, car on trouve ambascia dans la loi salique, tit. 19. Lindenbroeg dérive ambascia & ambactia de l’allemand ambacht, qui signifie œuvre, comme si on se louoit pour faire quelque ouvrage. Chorier est du sentiment de Lindenbroeg au sujet du même mot, qu’on lit dans la loi des bourguignons. Albert Acharisius, en son Dictionnaire Italien, le dérive du latin ambulare, marcher ou voyager. Enfin les jésuites d’Anvers, à l’endroit que nous venons de citer, disent que l’on trouve ambascia dans les loix des bourguignons, & que c’est de là que viennent les mots ambassicatores & ambasciatores, pour dire les envoyés, les agens d’un prince ou d’un état. Ils croient donc que chez les barbares qui inondèrent l’Europe, ambascia signifioit le discours d’un homme qui s’humilie ou s’abaisse devant un autre, & qu’il vient de la même racine qu’abaisser, c’est-à-dire de an ou am & de bas.

Le terme d’ambassadeur s’exprime en latin par legatus ou orator : cependant le mot ambassadeur a chez nous une signification beaucoup plus ample que celui de legatus chez les romains ; & à la réserve de la protection que le droit des gens donne à l’un & donnoit à l’autre, il n’y a presque rien de commun entre eux. Voyez Légation.

Des ambassadeurs chez les anciens. Les anciens ne choisissoient guères pour ambassadeurs que des hommes distingués par leur rang, par leur âge, & par leurs qualités personnelles. Chez Homère, c’est Ulysse & Ménélas qui vont faire aux troyens des propositions de paix ; & il suffit d’ouvrir Thucydide & Tite-Live, pour voir qu’on s’éeartoit rarement d’un principe si naturel.

I. On n’envoyoit presque jamais de jeunes gens en ambassade. Le terme de.presbus πρέσβυς, employé chez les grecs pour désigner un ambassadeur, signifioit dans le sens propre un vieillard. La loi des peuples de Chalcide, fixoit à cinquante ans l’âge nécessaire pour exercer une ambassade. Polybe rapporte que les achéens le nom-