Page:Encyclopédie méthodique - Economie politique, T01.djvu/198

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En un mot, on peut dire (aucun de ceux qui conn’oisserit YAngleterre,we trouvera cette assertion exagérée ), que lorsqu’il s agit de réxecution des loix, la naissance, les richesses, les dignités, le pquvqir même, font absolument fans effet. Ce qui prouve encore la bonté- des principes fur lesquels est fondé le gouvernement d’Angleterre, c’est le peu de précautions qu’il emploie pour fa sûreté. Bien différent de ces puissances ombrageuses, qui’, fóibles avec toute la force des loix, se croient perdues í si elles n’exercent pas une sorte d’oftracisme, si elles n’ont pas des dictateurs 8c :des inquisiteurs d’état, si elles ne peuvent condamner fans forme de procès ; le gouvernement & Angleterre n’est occupe que de, la protection’des individus, il ne s’arme que quand une loi, précisé déclàrele moment de rattaque(i) : Sç cette loi elle-même a réduit à si un" petit nom, -bre les cas óù le gouvernement peut se croire en danger] elle a exigé si peu du particulier, qu’un étranger, en Angleterre, est tenté d’abord de croire qu’il n’existe aucun ; pouvoir supérieur au sien j il ne s’appercoit enfin qu’il existe Un gouvernement, que par la sûreté dont il jouit (2). Quelque sujet de plainte qu’ait pu former la nation angloise contre plusieurs de ses parlemens, on ne voit pasqu’ils aient jamais donné ni.permis qu’on donnât atteinte à des loix essentielles à la liberté : on ne voit pas qu’ils aient sacrifié lès jurés ou la liberté de la preste 5 on ne voit, pas qu’ils aient négligé l’exécution de l’acte d’habeas corpus ; qu’ils aient rendu au roi le droit de dispenser des loix ; qu’ils aient mis de la négligence à conserver Je droit d’établir des impôts ; on ne voit pas enfin que la sûreté particulière ait jamais cessé. II y a eu fans doute dés choses irrégulières , parce que c’étoiènt des hommes 3 après rout, qui formoient le gouvernementales ouvrages extérieurs de la liberté, si je puis mexprimer ainsi’, •ont souffert des ébranlemens, mais le corps luímêrae s’est conservé immobile. , Ceux qui, après avoir -étudié la nature du gouvernement d’Angleterre,en examineront les effets, c’est-à-diré,’en viendront à la meilleure •preuve que, dans des choses de cé gente, on puisse adopter, avoueront qu’il a , par-dessus tous îes’gouvernemfens qui nous sont connus, trois avantages essentiels ; qu’il protège le plus sûrement ; ’qu’il exige lés plus petits sacrifices, 8c qu’il est le plus.susceptible de perfection.

w Çomme toutes les choses humaines ont une fin,

  • dit Montesquieu, Y Angleterre perdra sa liberté,

» 8c elle périra. Rome, Lacédémone 8c Carthage »"ont bien péri : ellé*périra lorsque la puissance législative fera plus corrompue que l’exécutrice ». . Mais cette :époque est bien plus éloignée qu’on ne le croit ; 8c la constitution angloise n’ayant presque aucun rapport avec les constitutions des républiques anciennes , il’-ne faut pas jiiger ici par analogie-. • Si les -nations libres de l’antiquité sont tombées sous le joug en assèz peu de temps, c’est qu’elles avoient confié la garde de la liberté à des corps ou à des individus qui en étoient. les ennemis. "Des machines politiques, dit M>. de -Lolme -, " n’ayant pour mobile que la vertu,pour point ^d’appui, que la modération, avoient à sunrionv ter la force vive 8c directement opposée, de », l’airibition , de Tintérêt personnel, qui dévoient » les démonter bientôt.

•» La : constitution d’Angleterre dirige à ses fins

" cette force elle-même ; c’est furi’amour de soi "qu’elle a fondé le jeu de ses diverses parties ;

?>.8c il’ ne faút point comparer des gouvernemens 

»-où la liberté tenoit à des causes foibles, inter- " mittentes Sc puissamment contrariées, à-celui " òù cette même liberté est établie fur des causes " agissantes, 8c agissantes dans tous les temps b » dans tous les lieux 8c fur tous les hommes ». , Par un art qu’on doit admirer , elle-a fait dépendre le maintien de la liberté de 1opposition des diverses parties du gouvernement, 8c elle a rendu cette opposition perpétuelle ; mais, par un bonheur singulier,les moyens d’opposition se trouvent, de nature à en prévenir Jes dangers. Us-’ ne mettent : les diverses parties effétat d’agir que ’ par contre-coup, fur les volontés l’une de l’autre ; ils lêurrendent nécessaire une certaine persévérance, 8c ne peuvent opérer que de certains sacrifices. Ainsi le,.parlement peut, en refusant des subsides, Ôter au roi les moyens de faire usage de ses prérogatives, mais il ne peut toucher à ces prérogatives ; il peut disposer les choses de ma-, nière que le roi trouve de très-grands avantages à consentir à une loi 3 mais il ne peut l’y obliger. - D’un autre côté, le roi peut, dans les temps de fermentation, énerver le pouvoir du peuple ypar la dissolution ou la prorogation de la chambre des communes ; mais ce moyen n’est jamais que passager. Le gouvernement ne péut subsister une année sansunechambre des communes ; Sc les membres actuels ne craignent la dissolution ou la prorogation que jusqu’à Un certain point : ils sont sûrs que des causes puissantes les feront bientôt rappellér. Quelque long, quelque profond qu’ait été le sommeil des représentans du peuple , l’instant de. Jéur réveil est celui où ils commencent à réparer, lés brèches de la constitution. Si la liberté a souf- (1 ) Lors des invasions du prétendant, l’acte d’habeas corpus fut suspendu ; mais cette précaution fut prise par les représentans dû peuple j & fixée à ’un ternie précis ; fur-tout elle ne priva personne de ses moyens de justification. Les personnes "arrêtées rie purent être jugées & condamnées que par leurs pairs, & eurent comme auparavant leurs droits de récusation péremptoire, &c. . . _ . n- , - (2) Je néVpatle ici que des étrangers doués -d’un bon .esprit ; car les autres font blesses de voir que le citoyen ia- .íustrieuxVy tremble pas, deyant l’opu’lence j ils traitent d’insoleuce lVir fier du peuple qui ne craint que les loix.