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il se plonga dans la débauche & l’infamie. Sans les adulateurs, le milieu & la fin de son règne eussent peut-être été dignes du commencement que tous les historiens ont célébré.

Si l’autorité du prince est limitée, l’adulation le sera aussi ; elle est sans bornes, lorsque l’autorité l’est elle-même. L’esprit de cour & l’adulation dominent moins dans une monarchie mixte, que sous un gouvernement arbitraire ; dans un gouvernement aristocratique, que dans une monarchie illimitée, & moins à proportion dans un gouvernement populaire. La parfaite égalité fait évanouir toute adulation, & une souveraineté absolue la fait monter au plus haut degré.

La corruption des États, commence d’ordinaire par les grands, ou pour mieux dire, ce sont eux qui sont les premiers auteurs de la corruption, & ils se distinguent toujours parmi ceux qui flattent les rois. Le prince qui gouverne ou qui veut gouverner arbitrairement, éleve aux emplois ceux qui louent tout ce qu’il fait ; & qui ne lui demandent aucune raison de sa conduite, plus ces adulateurs ont à gagner ou à perdre, plus ils font de bassesses, & plus ils flattent servilement. Ils se dédommagent de leur servitude sur le peuple ; s’ils sont vils & rampans pour ceux qui sont au-dessus d’eux ; ils traitent avec une extrême hauteur ceux qui leur sont soumis. La même bassesse d’esprit les porte également à l’adulation & à l’oppression. Ces deux vices se touchent, & on disoit avec raison de Caligula, qu’il n’y eut jamais un esclave plus complaisant, ni un maître plus cruel & plus détestable. Les bachas sont les esclaves du grand seigneur, & on sait avec quelle barbarie ils traitent les peuples de l’Empire Ottoman. Il ne faut pas confondre avec l’adulation les éloges d’étiquette qu’on donne par-tout aux princes, ni les louanges qu’on leur prodigue quelquefoîs, afin d’intéresser leur clémence. On peut excuser Marcus-Terentius, qui pour défendre sa vie en danger, dit à Tibère : « Les dieux vous ont donné la direction suprême de toutes choses, & nous ont laissé la gloire de l’obéissance ». Au commencement du règne de Néron, les sénateurs firent bien de louer quelques actions de cet empereur, qui annonçoient un prince occupé du bonheur de son peuple ; ils vouloient lui inspirer le desir de la gloire & exciter son émulation. Thrasea-Petus qui défendoit le préteur Antistius, accusé d’avoir écrit une satyre contre l’empereur, eut raison de louer la clémence du prince ; il ne songeoit qu’à obtenir le pardon de l’accusé.

ADVOUÉ, adj. Le protecteur ou le patron d’un corps ou d’une société.

Ce mot vient du latin advocatus, appellé à l’aide, ou de advotare, donner son suffrage pour une chose. Le Dictionnaire de Jurisprudence parle des différentes espèces d’advoué ; nous y renvoyons le lecteur.

Nous ajouterons ici que les empereurs d’occident prennent le titre d’advoués de l’église. C’est Charlemagne qui l’a porté le premier. Le pape le lui conféra pour avoir protégé l’Italie & l’église contre les Lombards. Dès-lors tous les empereurs en ont été décorés, & dans les capitulations de l’empire, ils promettent expressément qu’en qualité d’advoués ou d’avocats de l’église (car ces deux mots signifient ici la même chose), ils protégeront l’église & le clergé. On sait combien les circonstances modifient ces sortes de promesses ; & l’Europe connoit aujourd’hui les réponses de l’empereur Joseph II au pape Pie VI.

Advoué impérial. On nommoit ainsi un magistrat établi autrefois par les empereurs, pour administrer la justice en leur nom dans les villes de l’empire.

Les monastères, églises & évêchés avoient aussi leurs advoués ou avocats, pour soutenir leurs droits & rendre la justice à leurs vassaux.

Les advoués impériaux répondent assez à ce qu’on appelle Vidames en France. Voyez l’art. Vidames.

ADVOUERIE s. f. Cette dignité ne subsiste plus. C’étoit un patronage de certains princes & seigneurs particuliers sur des monastères & des églises, en vertu duquel ils rendoient la justice au nom de ces monastères & de ces églises, comparoissoient en leur place devant les tribunaux, faisoient leurs affaires temporelles, les protégeoient, & en tiroient des revenus. Ces protecteurs étoient nommés ou par les fondateurs même des couvens, ou par les empereurs & les rois. Aujourd’hui la plupart des monastères se sont affranchis des Advoueries qu’ils regardoient comme un joug onéreux.

ADVOYER s. m. Le terme d’advoyer vient originairement de celui d’advoué. On le donnoit autrefois à un magistrat ou officier qui administroit la justice dans certaines villes impériales.

Il y a aussi des advoyers dans plusieurs villes de Suisse ; & ce titre est affecté spécialement aux premiers magistrats des cantons de Berne, de Lucerne, de Fribourg & de Soleure.

AFFAIRES POLITIQUES. On appelle ainsi toutes les affaires qui concernent le gouvernement des états, soit au dedans ou au dehors, telles que l’administration de la justice, la police, les finances, les négociations, &c. Quoique la manière de traiter les affaires varie suivant leur nature & suivant les circonstances, il est possible néanmoins d’établir quelques regles générales. On a besoin par-tout d’ordre dans les départemens, de sagesse dans la direction, de promptitude dans l’expédition. Nous allons développer chacun de ces trois points.

De l’ordre dans les départemens.

Les affaires d’un état sont si multipliées, qu’il est nécessaire de les distribuer en différens départemens ou colleges supérieurs, & de subdiviser