Page:Encyclopédie méthodique - Histoire naturelle, 5, Insectes 2, A-Bom, T4.djvu/25

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Les animaux naissent sans doute assujettis à notre empire, destinés à nos besoins différens ; mais ne pouvons-nous alléger leur joug, & ne pas chercher, en les employant à nos divers usages, à diminuer les maux, les douleurs que nous ne pouvons éviter de leur faire souffrir. Qui ne voudroit diminuer ou abréger le supplice de l’animal, qu’il immole sans remords à ses besoins parce qu’il sait que cet animal est né sous la condition d’y satisfaire ? Qui pourroit supporter sans horreur les cris, les plaintes, les gémissemens, les hurlemens que pousseroient autour de lui pendant trois, quatre jours, sans interruption, les animaux qu’il destineroit à ses besoins différens ? & parce que les expressions de la douleur ne frappent pas nos oreilles de la part des insectes, nous ne sommes pas sensibles à leur tourment, nous ne faisons même pas réflexion qu’ils souffrent ! nous nous délivrerions, par rapport aux autres animaux, de l’horreur de leurs cris, & eux de leur supplice, en les faisant mourir promptement ! pourquoi n’en faisons-nous pas autant pour les insectes & pour les poissons que nous traitons de même avec le dernier excès de rigueur, par les mêmes raisons & par le manque de réflexion à leur sujet ! Eh quoi, me dira quelqu’un, s’attendrir sur le sort de quelques insectes, un plaidoyer sur ce mince sujet, en faveur de ces chétifs animaux : homme sans compassion, je t’ai prouvé qu’ils sont sensibles, que tu dédaignes de les ménager uniquement, parce que leurs plaintes ne t’importunent pas ; je ne te dis pas de ne pas les sacrifier à ta volonté, mais je t’engage à les faire souffrir le moins qu’il est possible, & tu y réussiras en en formant une collection par les moyens suivans ; la collection, loin d’en souffrir, n’en sera qu’en meilleur état.

On fera promptement mourir les insectes qu’on aura ramassés dans une course, en plaçant la boîte qui les contiendra dans une autre boîte beaucoup plus grande ; on ouvrira la première, on en contiendra le couvercle pour qu’il ne se ferme pas ; on placera au fond de la grande boîte un petit vase de terre, rempli aux deux tiers de fleur de soufre ; on allumera le soufre & l’on fermera la grande boîte avec exactitude. La quantité de soufre doit suffire pour qu’en brûlant il remplisse la boîte d’une vapeur épaisse ; une demie-heure après cette opération, on ouvrira la boîte au grand air pour laisser dissiper la vapeur du soufre. Fort peu de tems après, un quart d’heure environ, on pourra retirer la boîte plus petite & les insectes ; ils seront tous morts. Les couleurs n’en seront en aucune manière altérées, & la forme ne peut pas en avoir souffert.

Au lieu d’employer le soufre, on peut, selon les circonstances, placer les insectes qui sont piqués & la boîte qui les renferme, qu’on aura ouverte, ou dans un four, ou sous une cloche, un récipient de verre. L’excès de la chaleur fera périr les insectes en peu de tems.

Quelques personnes prennent des morceaux de cartes d’une grandeur qui excède celle des insectes, y compris leurs aîles, les piquent l’un après l’autre dans le milieu d’un des morceaux, tiennent avec les pinces la tête de l’épingle, en présentent à une bougie allumée la pointe qui rougit, communique à l’épingle une chaleur qui brûle l’intérieur de l’insecte ; c’est substituer un supplice bien dur à un supplice qui auroit été très-long, une mort cruelle à une mort lente. Ce procédé s’emploie avec succès pour retirer une épingle rouillée du corps d’un insecte desséché.

On a dit qu’en faisant tomber, avec un chalumeau, une goutte d’esprit de vin à la base des antennes, on tuoit instantanément les insectes. C’est un moyen qui réussit rarement. Si l’on veut faire mourir les insectes promptement, la vapeur du soufre me paroît le moyen le plus sûr, celui qui a le moins d’inconvéniens, ou plutôt qui n’en a pas.

Lorsque les insectes qu’on a ramassés ou