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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.


nairement, parce qu’il est aussi fait mention dans l’Ecriture, de la tunique couleur d’hyacinte, ce qui peut-être pourroit aussi s’entendre de la couleur naturelle du lin avant d’être blanchi. Si la collection des vêtemens du Grand-Prêtre prit ensuite le nom d’habit d’or, ce fut la magnificence des ornemens qui le leur valut. Les vêtemens, tous distingués, suivant les grades dans l’ordre hiérarchique, excepté la tunique & les caleçons, sont tous également de lin ; & les Prêtres Egyptiens les portoient de même, comme on le voit dans Plutarque.

A l’égard des voiles du Temple, qu’étoit-ce autre chose, dans le principe, que des toiles tendues entre la nef & le chœur, le chœur & le sanctuaire ? on les broda ensuite, on y inséra diverses couleurs, on en vint à mêler dans le tissu, la laine & le poil de chèvre avec le lin, mélange consacré aux ornemens du Temple, & que les prêtres s’arrogèrent par extension, quoique l’usage en fût défendu aux particuliers. Enfin on y employa des tapis de Babylone, & ils devinrent si magnifiques, qu’on les couvrit de rideaux, de tentes, de nouveaux voiles qui, comme les premiers, étoient de toile ; Sidon ne fut pas moins fameuse par ses toiles de lin, que par ses tapis & ses voiles précieux.

L’étoffe de l’habillement des statues Grecques & Romaines étoit partie de toile, partie d’autres étoffes légères ; il y en eut de draps ; mais la soie fut très postérieure, comme l’observe Winckelmann.

Thucydide dit positivement que les anciens Grecs étoient tous vêtus de toile. Hérodote pense que c’était particulièrement le vêtement de dessous ; mais tout annonce que, jusqu’à des temps plus rapprochés du siècle où ces deux Historiens ont vêcu, l’usage de la toile étoit général en Grèce ; longtems encore il y fut fréquent, puisque le lin le plus beau & le plus fin, se cultivoit & se fabriquoit aux environs d’Elis. Je ne sais sur quoi les Auteurs se font fondés, en disant que c’est seulement sous les Empereurs que l’usage du lin s’est introduit à Rome. Le fait n’est pas vraisemblable ; les Romains, avant ce tems, avoient parcouru, conquis, dévasté l’Égypte, l’Asie & la Grèce, où partout l’habit de dessous, des femmes surtout, étoit de toile, une vraie chemise enfin, telle qu’elles en usent parmi nous. Les statues Grecques apportées à Rome étoient ainsi vêtues. A celles même qui se firent chez les Romains, l’on distingue également la toile du drap par la transparence de la première, & ses petits plis applatis qui représentent le mai de très-près, & par les plis amples du second.

Au temps de Romulus & de Camille, & depuis, lorsque les Romains briguoient des dignités, pour mieux faire voir leurs blessures, ils n’avoient que la robe , la toge ou le manteau ; mais le vêtement de dessous, la tunique, se répandit bientôt à Rome comme en Grèce ; & il auroit été aussi indécent à un homme de se montrer avec ce seul vêtement, qu’il le seroit aujourd’hui de paroitre en chemise.