Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
228
ARC

fig. 65, dont l’œil O ſoit le centre, ou plutôt ſoit le ſommet d’un cône dont ces circonférences conſtitueroient la baſe, on obſervera un arc-en-ciel, c’eſt-à-dire, une bande demi-circulaire ornée des ſept couleurs priſmatiques, placées dans un ordre oppoſé à celui de l’arc intérieur ou principal.

Les couleurs de ce ſecond arc, de cet arc-en-ciel extérieur, ſont moins vives que celles de l’arc intérieur, parce que les rayons de lumière qui forment l’arc extérieur, ont ſubi deux réflexions en d & en e, fig. 64 ; & que les rayons de l’arc intérieur ne souffrant qu’une ſeule réflexion en t (fig. 63), ceux-là ſont moins affoiblis que ceux-ci. Chaque réflexion, comme chaque réfraction, produit un déchet & une diminution d’intenſité dans l’éclat des couleurs. Auſſi les rayons qui ont été réfléchis en t (fig. 63), & en d & e, (fig. 64) ont-ils éprouvé une diſperſion d’une partie des filets lumineux qui les formoient du bord ; & nous n’avons conſidéré que la portion reſtante du rayon, celle qui a continué la route tracée jusqu’à l’œil.

Dans l’explication de l’arc-en-ciel intérieur & extérieur, & dans celle des figures 63 & 64, on a dit que ſes couleurs ſe préſentoient à l’œil, ou ſur un carton, d’O en B, O étant le rouge & B le violet ; mais l’ordre dans lequel nous voyons la ſuite des couleurs priſmatiques dans l’arc-en-ciel même, eſt entièrement oppoſé, parce que tous les ſept rayons primitifs ſe croiſant au point e, fig. 63, & en g, fig. 64, nous rapportons en r & r l’impreſſion faite en O & O ; en b & b, celle qui a été faite en B & B, & ainſi des autres qui ſont intermédiaires. Mais B (fig. 63) étant en haut, il faut que le point où l’œil rapporte l’impreſſion faite dans cette direction, ſoit après le croiſement dans la partie inférieure en b ; de même O ſera rapporté en r. Il faut en dire autant des parties correſpondantes de la figure 64. Cet effet vient de cette loi générale d’optique que nous rapportons toujours les impreſſions en ligne droite ; & qu’après le croiſement de deux ou plusieurs rayons qui paſſent par un trou ou par un point, les apparences ſont conſéquemment renversées. C’eſt ainſi que ſur la rétine ou dans une chambre obſcure, comme nous le dirons en ſon lieu, la peinture des objets extérieurs eſt entièrement renverſée.

Il eſt facile de démontrer par expérience, la vérité de cette explication. Prenez une boule de verre creuſe & mince, remplie d’une eau bien-claire, & ſuſpendue par le moyen de deux cordons M H G C, fixés par une extrémité à un bouton ſoufflé à chaque pôle, paſſant enſuite ſur des poulies, & retenus par la main M, comme on le voit en la figure 64. Si cette boule eſt vers le fond d’un appartement, que les rayons du ſoleil puiſſent tomber ſur elle, ſoit ſur la partie ſupérieure, ſoit ſur la portion inférieure, & qu’un ſpectateur ſoit entre le ſoleil & la boule qui repréſente une goutte de pluie, on verra ſucceſſivement les couleurs de l’arc-en-ciel à meſure qu’on élèvera ou abaiſſera cette boule, de manière que les rayons émergens S s qui viennent du ſoleil à la boule, & ceux qui vont du point g, fig. 63, ou du point e, fig. 64, faſſent des angles d’environ 40 & 42 degrés, & de 50 & 54 degrés environ. Ces couleurs priſmatiques occuperont l’eſpace de D en E & de G en H, en commençant par le rouge & finiſſant par le violet. Or c’eſt ce que l’obſervation confirme ; car on verra le rouge en r, le violet en b, & les autres couleurs entre ces deux extrêmes. Si on a diſpoſé, comme il eſt déſigné, fig. 63 & 64, quatorze globes, dont ſept reçoivent un rayon ſolaire par la partie ſupérieure & les ſept autres par l’inférieure, on obſervera le même ordre des couleurs que dans l’arc-en-ciel double, lorſque ces quatorze globes ſeront à des hauteurs convenables, c’eſt-à-dire, qu’on verra la couleur violette aux deux extrémités 1 & 14, & la couleur rouge aux points intérieurs 7 & 8, déſignés par r & r.

Maintenant ſuppoſons qu’on ait rangé circulairement 14 ſuites de globes ſemblables, ſur autant de circonférences concentriques, comme en Α F B E, C H D G (fig. 65), où on n’en a marqué que 4, E, F, G, H, pour éviter la confuſion ; & que l’œil ſoit en O, ſommet du cône dont ces différentes circonférences forment la baſe, on verra réellement deux bandes circulaires, ſéparées entr’elles par un intervalle, & chacune ornée des ſept couleurs priſmatiques dans l’ordre où on les aperçoit, lorſque dans le ciel l’arc-en-ciel intérieur & extérieur ſont viſibles

Les choſes ſont ainſi dans la réalité, puiſque la pluie tombant dans l’endroit où on voit dans l’arc-en-ciel, il n’y a aucun point de cette partie de l’athmoſphère où pendant la chûte de la pluie il n’y ait des globules d’eau. Tous ceux qui ſe trouvent dans ces deux zones circulaires, ſervent à former l’arc-en-ciel double ; & les autres gouttes de pluie qui ſont au-deſſus, au-deſſous ou à côté, deviennent inutiles, parce que les rayons ſolaires réfractés & réfléchis n’arrivent point à l’œil, mais paſſent au-deſſus, au-deſſous ou à côté, & ne nuiſent aucunement à ceux qui ont agi efficacement ſur l’œil.

Indépendamment de l’expérience de la boule de verre, on peut encore confirmer la théorie donnée de l’arc-en-ciel par une autre expérience très-facile. Il ſuffit de tourner le dos au ſoleil, lorſqu’il eſt à une petite hauteur ſur l’horiſon, de remplir ſa bouche d’eau, & de la faire jaillir enſuite ; ou dans la même poſition, d’avoir une ſeringue pleine d’eau, & de la faire jouer ; ou enfin de ſe placer devant un jet d’eau que le vent agite & diviſe en petite pluie, on apercevra les ſept couleurs priſ-