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ARÉ
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ſible. L’eſprit-de-vin que j’y ai employé étoit à l’eau pure, comme huit cent trente eſt à mille ; c’eſt-à-dire que huit cent trente grains de cet eſprit occupoient un volume de mille grains d’eau, ou qu’il étoit de cent ſoixante-dix millièmes plus léger que l’eau pure. Cet eſprit-de-vin avoit été préparé par M. Peltre, habile pharmacien, & réputé pour donner à ſes opérations l’attention la plus ſcrupuleuſe. Je ſuis fondé à croire qu’il m’a donné l’eſprit-de-vin le plus pur ; puiſque le célèbre M. Beaumé, dans ſes élémens de pharmacie, regarde comme très-rectifié tout eſprit-de-vin, dont ſix gros quarante-huit grains rempliſſent une bouteille capable de contenir une once d’eau, & qui par conſéquent eſt à l’eau, comme cent trente-trois un tiers eſt à mille, ou qui eſt de 166 millièmes 2 tiers plus léger que l’eau pure. Il eſt bon d’obſerver que j’ai comparé mon eſprit-de-vin à l’eau, ſous la température de 10 degrés de Réaumur, ainſi que l’a fait M. Beaumé.

J’avois un eſprit-de-vin de 170 degrés de légèreté. Cette différence, entre ſa peſanteur ſpécifique & celle de l’eau pure, m’a déterminé à faire les mélanges par parties qui fuſſent des 170mes du total.

J’ai commencé par mettre 10 parties d’eſprit-de-vin ſur 160 parties d’eau, & j’ai trouvé que ce mélange qui, ſelon les règles d’alliage, devoit être à 10 degrés de légèreté, & ne peſer que 990 grains ſous le volume de 1 000 grains d’eau, de fait étoit à 7 degrés, & peſois 993 grains. J’en ai conclu, 1o. que 993 grains de ce mélange contenoient 935 grains d’eau & 58 grains d’eſprit-de-vin pur : 2o. que l’eau & l’eſprit-de-vin s’étoient pénétrés ou condenſés de 3 millièmes dans le mélange.

Un ſecond mélange de 20 parties d’eſprit-de-vin & de 150 parties d’eau, ſoumis à l’aréomètre, s’eſt trouvé à 14 degrés au lieu d’être à 20, & peſer 986 grains au lieu de 980 : d’où j’ai conclu qu’un volume de ce mélange à celui de 1 000 grains d’eau, contenoit 116 grains d’eſprit-de-vin ſur 870 d’eau, & que leur pénétration étoit de 6 millièmes.

Après avoir fait de la même manière un troiſième mélange de 30 parties d’eſprit-de-vin ſur 140 parties d’eau ; un 4e de 40, ſur 130, un 5e de 50, ſur 120, &c. avoir déterminé le poids de chaque mélange ſous le volume de 1 000 grains d’eau, le nombre de grains d’eau & le nombre de grains d’eſprit-de-vin qui entroient dans chacun, leur pénétration ; j’en ai dreſſé une table compoſèe de 18 termes. Puis inſérant entre ces termes autant de moyens arithmétiques qu’il y avait de degrés de différence, j’ai formé la table entière telle qu’on la voit. La ſolution des problêmes ſuivans en fera connoître l’uſage & l’utilité.

1o. Trouver par le moyen de l’aréomètre ce que pèſe la pinte d’une liqueur donnée.

L’aréomètre ſubmergé juſqu’au point d’émail, vous fera connoître, par le nombre de grains que vous aurez mis ſur le godet ajouté à celui qui s’y trouve écrit, ce que pèſe une meſure de cette liqueur égale au volume de 1 000 grains d’eau. Multipliez ce nombre par 18, vous aurez en grains le poids d’une pinte de cette liqueur. En effet, la pinte de Paris contient 18 000 grains d’eau diſtillée : L’aréomètre marque ce que pèſe une meſure de liqueur égale au volume de 1 000 grains de cette eau : il marque donc ce que pèſe la dix-huitième partie de la pinte. Donc, en multipliant par 18, le poids trouvé par l’aréomètre ou marqué dans la table, vous aurez le poids d’une pinte de la liqueur propoſée.

2o. Un vin d’un degré connu ayant été altéré par un mélange d’eau, trouver la quantité d’eau qui a été miſe dans le vin.

Voyez dans la troiſième colonne la quantité d’eau qui répond au degré du vin avant son altération, & enſuite celle qui répond au degré du même vin après son altération ; comparez ces deux quantités d’eau : leur différence marque évidemment combien on a mis d’eau dans le vin.

On connoîtra de la même manière un mélange d’eau-de-vie & d’eau.

3o. Le degré de légereté d’un vin étant connu ; trouver combien on peut en tirer d’eau-de-vie d’un degré donné. Par exemple, combien on tireroit d’eau-de-vie à 70 degrés, d’un vin qui ſeroit de 6 degrés plus léger que l’eau.

Cherchez dans la quatrième colonne combien il y a d’eſprit-de-vin dans le mélange qui répond à 70 degrés : & combien il y en a dans celui qui répond à 6 : vous trouverez 493 & 50. Diviſez la première quantité par la ſeconde ; le quotient 9 + 43 cinquantièmes eſt le nombre des meſures de vin à 6 degrés qui donnera au moins une meſure d’eau-de-vie au degré demandé.

Je dis, au moins, parce que le vin contient effectivement plus l’eſprit qu’il n’y en a dans le mélange auquel je le compare. L’eau & l’eſprit ardent ſont bien les principaux élémens du vin, ceux qui entrent dans ſa compoſition en plus grande abondance ; mais ils n’en ſont pas les ſeuls. Il y entre des principes ſalins & terreux, dont la peſanteur ſpécifique eſt plus grande que celle de l’eau. Il faut donc plus d’eſprit-de-vin pour les amener au ſixième degré de légèreté, qu’il n’en faut pour faire venir l’eau au même degré. Concluons que le vin en queſtion ne donnera pas une quantité d’eau-de-vie plus petite que celle qui eſt déterminée par la solution du problême, mais qu’elle