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ARÉ-ARG

peut en fournir une plus grande. Le ſurplus dépend de la quantité des matières terreuſes & groſſières qui reſtent en diſſolution dans le vin ſuppoſé. L’expérience ſeule peut nous faire connoître ce surplus.

L’erreur ſeroit moins grande dans l’eſtimation d’une quantité d’eau-de-vie néceſſaire pour faire de l’eſprit-de-vin : parce que l’eau-de-vie ne contient guère que du flegme & de l’eſprit. Ce qui entre de plus dans ſa compoſition, ne fait qu’une partie inſenſible de ſon poids.

Ainſi, pour trouver, par exemple, combien il faudroit d’eau-de-vie à 61 degrés pour faire de l’eſprit-de-vin à 166, on cherchera dans la table la quantité d’eſprit qui répond aux degrés 61 & 166 ; on trouvera 448 & 822 : diviſant le ſecond nombre par le premier, on aura 1 & un peu plus de 8 dixièmes. Ce quotient ſera le nombre des meſures d’eau-de-vie qui fera une meſure d’eſprit-de-vin.

Il eſt inutile de s’étendre ici ſur les avantages d’un bon aréomètre ; puiſque perſonne ne doute que c’eſt d’après la connoiſſance de la peſanteur ſpécifique des liqueurs, que le phyſicien en découvre les principales propriétés ; que le mathématicien en calcule les rapports ; que le chimiſte s’aſſure de leur déphlegmation ou concentration, & que le commerçant en apprécie la valeur. Rien de plus utile par conſéquent qu’une balance ſimple, portative, & d’un uſage aiſé, au moyen de laquelle on puiſſe voir dans l’inſtant & avec préciſion ce que pèſe une liqueur quelconque, ſous un volume donné.

Nous avons cru qu’il étoit à propos de faire connoître les divers aréomètres qui ont été inventés juſqu’à ce jour, perſuadés que ceux qui cultivent les ſciences phyſiques, en liroient avec plaiſir les différentes deſcriptions accompagnées de figures. Nous les avons tous fait conſtruire pour le cabinet de phyſique des états-généraux de Languedoc, ceux qui nous paroiſſent mériter la préférence, ſont ceux à tige & à godet, de Dom Casbois.

On obſervera ici qu’il eſt à propos d’avoir pluſieurs ſortes d’aréomètres dans un cabinet de phyſique complet, dont les uns ſervent pour les acides concentrés, d’autres pour les eaux minérales, les eaux ordinaires ; quelques-uns pour les vins & pour les eaux-de-vie & les eſprits, enfin d’autres pour les ethers. On ſent bien que ſi on n’emploit qu’un ſeul aréomètre pour les différens uſages auxquels cet inſtrument peut ſervir, il devroit être d’une grandeur & d’un volume conſidérable, & qu’il exigeroit une grande quantité de liqueur pour l’épreuve, ce qui ſeroit très-incommode & dispendieux.

Ainſi, un ſeul aréomètre qui ſerviroit à éprouver les acides minéraux les plus concentrés, & tous les liquides intermédiaires, juſqu’aux ethers les mieux rectifiés, auroit une longueur démeſurée ; c’eſt pourquoi il faut, ainſi que nous l’avons dit, avoir une ſuite d’aréomètres dont l’un commence où l’autre finit, & qui puiſſent ſervir à peſer la ſérie de liquides dont nous avons parlé.

Aréomètre à pompe. Voyez hygroclimax.

ARG

ARGENT. L’argent que les anciens nommoient lune eſt un métal parfait, d’un blanc brillant & éclatant. Il n’a aucune odeur ni ſaveur. Plus dur que l’or, l’étain & le plomb, il l’eſt moins que le cuivre & le fer. Peſé à la balance hydroſtatique, il perd environ un onzième de ſon poids : un pied cube d’argent fondu, pèſe ſept cent vingt livres. La ténacité de ſes parties eſt près de moitié moindre que celle de l’or : un fil d’argent, d’un dixième de pouce de diamètre, ne peut ſoutenir qu’un poids de deux cent ſoixante-dix livres avant que de ſe rompre, ſelon les expériences de M. Bertoud, dans ſon eſſai ſur l’horlogerie.

Après l’or, l’argent eſt le plus ductile des métaux ; à force de le battre on le réduit en lames ou feuilles plus minces que le papier le plus fin. Un grain d’argent, qui esſ bien peu de choſes, peut former par ſon extenſion un vaiſſeau capable de contenir une once d’eau ou une lame de trois aunes de long & de deux pouces de large. On peut en faire de même des fils de la plus grande fineſſe, comme on le verra à l’article Divisibilité.

L’argent eſt plus ſonore & plus dur que l’or, le ſon qu’il rend a de l’éclat. Il se fond à un degré de feu un peu moindre que l’or : & il eſt preſqu’auſſi fixe & auſſi indeſtructible que l’or. Kunkel a tenu de l’argent, de même que de l’or, dans un feu de verrerie, pendant plus d’un mois, ſans éprouver aucune altération : on n’y a remarqué qu’un petit déchet de quelques grains, qui pouvoit venir de l’alliage de quelque matière étrangère. La chaleur fond, fait bouillir & volatiliſe l’argent, mais ſans altération. Tenu en fuſion pendant quelque temps, ce métal ſe bourſoufle & il exhale des vapeurs qui ne ſont que de l’argent volatiliſé, ainſi que le prouvent les expériences faites en 1772, par MM. Macquer, Tillet, Lavoisier & Briſſon, au foyer des deux grandes lentilles de Tſchirnhauſen, de 33 pouces de diamètre, & de la loupe de M. de Trudaine. On y vit l’argent fondu répandre une fumée épaiſſe de cinq à ſix pouces de hauteur, qui blanchiſſoit une lame d’or qu’on y exposoit ; on obſerva de même une lame d’argent ſe dorer à la fumée de l’or ; d’où il ſuit que la fumée de l’or & de l’argent ne ſont que ces métaux eux-mêmes volatiliſés, comme la fumée de l’eau, celle du mercure, &c., ne ſont que l’eau réduite en vapeurs, ou le mercure volatiliſé. La fixité des métaux parfaits, ni probablement celle d’aucun autre