Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/578

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le beau temps le mercure s’élève & ſe ſoutient plus haut que dans le mauvais temps, aux approches duquel il baiſſe, on ne peut s’empêcher de convenir que la colonne d’air qui eſt en équilibre avec la colonne barométrique, ne ſoit plus peſante dans le beau temps que dans le mauvais temps. S’il y a plus de parties aqueuſes dans le beau temps que dans celui qui eſt diſpoſé à la pluie, certainement la colonne d’air atmoſphérique qui preſſe la ſurface du mercure, ſera plus peſante, puiſqu’à ſon propre poids ſera ajouté celui de l’excès des vapeurs. Or, la quantité des molécules aqueuſes qui exiſtent dans l’atmoſphère, eſt plus conſidérable dans le beau temps que dans celui qui ne l’est pas. Quoique cette propoſition ait l’air d’un paradoxe, elle n’en eſt pas moins appuyée ſur des raiſons qui ſemblent ſatisfaiſantes. On attribue communément à l’air une puiſſance diſſolvante de l’eau, & cette faculté eſt plus grande, ſans contredit, dans le beau temps. Une certaine combinaiſon jointe à un certain degré des différentes qualités de l’air, contribue beaucoup à donner plus d’intenſité à ſa vertu diſſolvante ; un air ſec, chaud, élaſtique, plus agité par le mouvement de fluidité, & par celui des zéphirs & des vents légers, contenant plus de calorique combiné avec le fluide électrique, &c. &c. Cet air, doué de ces qualités à un plus haut degré, ſera bien plus capable de diſſoudre les vapeurs ; il ſera donc plus peſant, preſſera davantage le mercure, & le ſoutiendra plus haut dans le beau temps ; où l’expérience prouve que l’air jouit de cette réunion de qualités.

Quoique dans le mauvais temps la tranſparence de l’air ſoit troublée & beaucoup moindre que dans un temps ſerein, on ne doit pas en conclure que dans celui-ci il y ait moins de vapeurs répandues dans l’air que dans celui là ; car il faut ſoigneuſement diſtinguer la diſſolution des vapeurs, d’avec leur ſuſpenſion dans l’air. Dans un temps ſerein, il y a un nombre conſidérablement plus grand de molécules aqueuſes, diſſoutes dans l’air, & à une plus grande hauteur dans l’atmoſphère, que dans celui qui n’eſt pas ſerein. Or, cet excès de molécules peſantes doit augmenter le poids de la colonne atmoſphérique ; mais dans le mauvais temps, il y a plus de molécules aqueuſes ſuſpendues dans la partie de l’atmoſphère voiſine de la ſurface de la terre ; & ce ſont ces molécules ſuſpendues & non diſſoutes qui troublent la tranſparence de l’air, quoiqu’elles ſoient en moindre nombre que les molécules diſſoutes par l’air dans un temps ſerein. Le préjugé dans lequel ſont beaucoup de perſonnes qui s’imaginent que dans le mauvais temps il y a plus de parties aqueuſes dans l’atmoſphère que dans un temps ſerein, vient de ce qu’ils ne conſidèrent alors que les vapeurs ſuſpendues près de la terre, ſans faire attention à la quantité conſidérable de molécules aqueuſes, vraiment diſſoutes pendant un beau temps à une grande hauteur dans l’atmoſphère, & qui ſont notablement plus nombreuſes que celles qui ne ſont que ſuſpendues.

Si quelqu’un avoit de la peine à concevoir ce qu’on vient de dire, on lui rappelleroit qu’un ſel diſſous dans l’eau n’en trouble pas la tranſparence ; mais que des particules ſalines groſſièrement pulvériſées, jettées dans l’eau & agitées pendant un inſtant, lui font perdre ſa limpidité, quoique dans ce dernier cas la quantité de ſel ſoit beaucoup moindre que celle qui eſt diſſoute dans le premier. Cette expérience eſt facile à faire, & elle m’a paru toujours produire une grande impreſſion ſur tous ceux qui aſſiſtent à mes cours publics de phyſique. Je met dès la veille dans un vaſe de verre, rempli d’eau, une quantité de ſel que je fais diſſoudre juſqu’à parfaite ſaturation, & cette eau eſt très-tranſparente. Au moment de l’expérience, le lendemain, je jette dans un autre vaſe ſemblable, le quart de la quantité de ſel employé dans la première expérience, j’agite un peu l’eau pour que le mélange ait lieu, & l’eau a perdu ſenſiblement ſa tranſparence. Dans cette expérience le rapport du ſel eſt à la première comme 1 à 4. Quelle ne ſeroit pas l’erreur de ceux qui, jugeant par la ſimple inſpection, s’imagineroient qu’il y a plus de ſel dans l’eau du ſecond vaſe que dans celle du premier ! Eh bien ! l’erreur eſt la même pour ceux qui penſent que dans un temps diſpoſé à la pluie, il y a plus de vapeurs dans l’air que dans un temps ſerein, parce que la tranſparence de l’air eſt troublée dans la première circonſtance.

Souvent n’obſerve-t-on pas de grandes pluies après une très-longue ſérénité. Cet immenſe amas d’eau qui tombe alors eſt une preuve ſans replique, que dans un temps ſerein il y avoit dans l’atmoſphère, une quantité très-conſidérable d’eau diſſoute. Je pourrois étayer par d’autres obſervations de ce genre cette vérité ; mais il n’eſt perſonne à l’eſprit de qui elles ne ſe présentent facilement.

On ne ſera donc pas ſurpris qu’en hyver, comme en été, & dans toutes les ſaiſons, le baromètre ne s’élève plus haut dans un temps ſerein que dans celui qui ne l’eſt pas, parce que la combinaiſon des qualités de l’air favorables à ſa vertu diſſolvante, peut exiſter dans ces divers temps, & qu’il peut y avoir des compenſations dans l’intenſité réciproque de quelques-unes de ces qualités qui produiſent le même effet ; par exemple, ſi dans l’hiver il y a moins de chaleur qu’en été, il y auſſi plus de reſſort dans l’air, &c. &c.

De l’effet que la chaleur produit ſur le baromètre. M. Amontons eſt le premier qui ait penſé que la peſanteur ſpécifique du mercure dans le baromètre devoit varier ſuivant les divers degrés de température, & qui en conſéquence ait cherché les moyens de corriger les influences de ces variations ſur cet inſtrument. Il trouva d’abord que le mercure augmente ſon volume d’environ du grand chaud au grand froid à Paris. Sur ce