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nouvelle aiguille, appliquée ſur la roſe de carton, de telle ſorte que la fleur de lys décline du point obſervé dans le même ſens & de la même-quantité que faiſoit le pole du nord de l’aiguille mince & pointue ; on fixera la roſe dans cette ſituation, & la bouſſole ſera centrée.

Il vaudra mieux faire cette opération ſur un vaiſſeau en cette manière : on tirera une ligne droite de la poupe à la proue, & on placera les deux bouſſoles ſur cette ligne, à une telle diſtance & en telle ſorte qu’elles ne puiſſent ni agir l’une ſur l’autre, ni être détournées par aucun fer qui ſoit dans le voiſinage ; on ajuſtera la roſe comme on vient de le dire, de manière que la fleur de lys faſſe, avec la ligne de preuve, le même angle que fait le pole du nord de l’autre aiguille.

On ne ſauroit diſſimuler que le poids de ces nouvelles aiguilles ne faſſe augmenter leur frottement, ſur tout ſi le pivot & la chape ſont de cuivre ; car il n’est guère poſſible de ſe ſervir à la mer de pivot d’acier, qui ſeroit bientôt rouillé. Mais on pourra remédier à cet inconvénient, en employant un pivot d’or, allié de quelque métal pour l’endurcir, & en attachant aux barres des chapes garnies d’un petit morceau de verre concave bien poli ; ce qui vaut encore mieux que l’agathe dont on ſe ſert quelquefois. Ce petit changement, qui n’augmente pas conſidérablement le prix des bouſſoles, donne à ces inſtrumens plus d’exactitude qu’on ne peut eſpérer dans les bouſſoles ordinaires, ſur-tout lorſque le temps eſt calme, & que les vagues n’agitent pas le vaiſſeau : car alors il faut néceſſairement frapper les boîtes pour vaincre les frottemens, si l’on veut que la bouſſole marque la route avec exactitude ; au lieu que les nouvelles bouſſoles ſe meuvent très-librement ſans ce ſecours.

On a conſtruit, ſur ces principes, une aiguille de bouſſole qui avoit trente-deux pouces de longueur, & qui peſoit un peu plus de huit onces. Elle a été miſe en mouvement avec une force capable de lui faire faire vingt-cinq tours par minute : cette force a été ſuffiſante pour lui faire continuer ſes révolutions pendant l’espace de ſoixante-dix ou quatre-vingt minutes, & elle a encore fait des vibrations pendant quinze autres minutes, quoiqu’elle ne fût que ſur un pivot de cuivre, qui a été bientôt émouſſé par ſon poids, au lieu qu’elle a fait à peine quelques vibrations lorſqu’elle a été ſuſpendue, par une chape de cuivre, ſur un pivot d’acier bien pointu & bien poli.

Les avantages de la bouſſole ne ſe bornent pas à ceux qu’en peuvent retirer les navigateurs ; cet inſtrument eſt aussi fort utile ſur la terre pour faire une infinité d’opérations : on y fait ſeulement différens changemens pour le rendre plus propre aux divers uſages auxquels on le deſtine. Son application la plus commune eſt à l’équerre des arpenteurs, qui ne conſiſtoit anciennement que dans un cercle de cuivre diviſé en quatre parties égales par deux diamètres qui ſe coupent à angles droits. Il y a une pinnule bien perpendiculaire au plan du cercle, à l’extrémité de chacun de ces diamètres, afin de pouvoir pointer sur différens objets.

Dans les nouvelles équerres d’arpenteur on a ajouté au centre du cercle un pivot, ſur lequel eſt ſuſpendue une aiguille aimantée, & renfermée dans une boîte couverte d’une glace. L’aiguille parcourt dans ſes différens mouvemens la circonférence d’un cercle diviſé en 360 degré ; & le O de la graduation marqué d’une N (nord), ou d’une fleur de lys, eſt directement au-deſſous d’une des pinnules, en ſorte que les autres points cardinaux ſe trouvent auſſi ſous les autres pinnules : toute la machine eſt montée ſur un genou, ſur lequel on peut la tourner librement en tout ſens.

On ſe ſert auſſi quelquefois de bouſſoles enfermées dans des boîtes exactement quarrées, & dont les côtés ſont bien parallèles aux diamètres qui passent par les points cardinaux. Celles-ci ſont très-commodes, par exemple, pour trouver la déclinaiſon d’un mur ou d’un édifice, c’eſt-à-dire, l’angle qu’ils forment avec le méridien du lieu. Pour cet effet on applique à une règle poſée horiſontalement le long du mur le côté de la boîte marqué ſud ou nord, ſuivant que le mur regarde à-peu-près le ſeptentrion ou le midi ; enſuite on obſerve quel angle fait la pointe de l’aiguille, ou ſon pôle boréal avec le méridien tracé ſur la bouſſole, & qui eſt perpendiculaire à la règle. Cet angle, réduction faite, de la déclinaiſon de l’aimant, exprime en degrés la véritable déclinaiſon du mur, laquelle eſt orientale ou occidentale, ſuivant que l’aiguille s’écarte à l’eſt ou à l’oueſt du méridien de la bouſſole, dans le cas où le mur eſt tourné du côté du midi, & réciproquement, lorſqu’il regarde le ſeptentrion. Ceux qui conſtruiſent des cadrans ſolaires verticaux, ont ſouvent recours à cette méthode pour trouver la déclinaiſon du plan ſur lequel ils veulent en tracer.

La géométrie pratique tire de grands avantages de la bouſſole, pour lever d’une manière expéditive des angles ſur le terrein, ſaire le plan d’une forêt, d’un étang, d’un marais inacceſſible, ou pour déterminer le cours d’une rivière.]

Les aiguilles de bouſſole, 1o. doivent être d’acier trempé très-dur, parce qu’elles ſont plus ſuſceptibles alors de recevoir & de conſerver une grande vertu magnétique ; 2o. il faut qu’elles ſoient légères juſqu’à un certain point, afin d’obéir plus facilement aux impreſſions de la vertu magnétique. Cependant ſi elles ſont trop légères, elles ne reçoivent pas autant de magnétiſme ; 3o. elles doivent avoir