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Le brigadier Frédéric.

en l’air, une voix rude criait de l’Hôtel de ville :

« Hérausse[1]. »

C’était le sergent du poste qui donnait l’ordre à ses hommes de sortir ; l’officier de ronde arrivait, les autres se précipitaient du corps de garde et se mettaient en rang : il était midi !

J’avais fait halte tout consterné, à la porte du café Vacheron. Une foule de pauvres gens sans asile, sans travail et sans pain, allaient et venaient, grelottant, les mains dans les poches jusqu’aux coudes ; et moi, sachant d’après ce que m’avait dit Thomé, qu’une foule de malades encombraient l’hôpital militaire et le collège, je me demandais s’il se trouverait un médecin pour visiter au Graufthâl une pauvre vieille femme en danger de mort. La tristesse et le doute m’accablaient ; je ne savais à qui m’adresser ni quel parti prendre, quand un vieil ami de la maison forestière, Jacob Baure, le premier pêcheur de truites de la vallée, se mit à crier derrière moi :

« Hé ! c’est le père Frédéric ! Vous êtes donc encore de ce monde ? »

  1. Dehors