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BIOGRAPHIE ET CORRESPONDANCE

XVI

À Thomas Rediger, à Valence en Dauphiné.


S. P. — Cher Rediger, je sais que tu m’accuseras d’avoir assez de négligence et d’ingratitude de ce que je ne t’ai pas remercié par lettre de ton aimable présent. Mais lorsque tu connaîtras les motifs qui m’ont empêché d’être plus prompt à te répondre, je crois qu’une partie de la faute, que je confesse, me sera excusée. Au milieu de nos séditions, j’ai reçu une blessure sur la jambe droite, avec une forte contusion, et peu s’en est fallu que je n’eusse la jambe fracturée. Une inflammation très grave s’en est suivie, avec de grandes douleurs qui me clouèrent sur mon lit, ce qui fait que je ne suis pas sorti pendant près de trois mois de ma chambre à coucher. Trois jours après que j’avais reçu cette blessure, Materne m’envoya de ta part une très élégante horloge, et il ne pouvait m’être fait de plus agréable présent. Aussi je lui en aurais témoigné bien volontiers ma reconnaissance, si mes douleurs m’eussent laissé quelque repos. Ma blessure soignée, conduite du moins jusqu’à la cicatrisation, je sus que les routes n’étaient plus fermées dans ce pays, ce qui m’avait privé de l’occasion de t’écrire ou de te témoigner ma gratitude par quelque petite lettre. Aussi, après mon retour ici, mon premier soin fut-il de t’écrire ces mots par lesquels je te prie de ne pas croire à ma négligence. Quant à ton présent, pour lequel je le remercie tout autant que je puis, il reste chez moi comme une preuve perpétuelle de ta libéralité et de ta bienveillance. J’aimerais mieux cependant te déclarer à toi-même combien ce présent m’a été agréable que de te l’écrire par ce bout de lettre.

Il y a trois jours, j’ai reçu des lettres de Craton, par lesquelles il m’apprend le ravage qui a été porté chez nous par les Turcs, et que nous connaissions déjà, puis que ton généreux frère Jean, du