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LES PERSES

LE CORYPHÉE

J’ai peur de te regarder, et j’ai peur de te parler en face : l’antique vénération que j’ai pour toi m’émeut encore.

L’OMBRE DE DARÉIOS

Puisque, d’en bas, je suis venu ici, appelé par tes gémissements, ne me tiens pas de longs discours : brièvement, dis-moi tout, et oublie le respect que tu as pour moi.

LE CORYPHÉE

J’hésite à t’obéir, et j’hésite à te parler en face : il est dur d’annoncer à des êtres chers des malheurs cruels.

L’OMBRE DE DARÉIOS

Puisque un ancien respect lui trouble la pensée, toi, compagne vénérée de mes nuits, ô noble femme, cesse de pleurer et de gémir, et parle-moi clairement. Les douleurs humaines peuvent frapper tout homme. Aux mortels bien des souffrances viennent de la mer, bien des souffrances viennent de la terre, pour peu que s’allonge la durée de la vie.

ATOSSA

Ô toi dont la fortune a dépassé le bonheur de tous les hommes, tant que tes yeux ont contemplé les rayons du soleil, tu as vécu, envié, une vie heureuse, et les Perses t’adoraient comme un Dieu. Et maintenant, je t’envie, toi qui es mort avant d’avoir vu le gouffre de nos malheurs. Tous, Daréios, tu les apprendras en peu de mots : elle est détruite, la puissance des Perses ! Oh, j’ai tout dit.

L’OMBRE DE DARÉIOS

Comment ? Quelque peste foudroyante vous a-t-elle abattus, ou quelque révolte ?