Page:Esquiros - Les Hirondelles, 1834.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 42 —

Le ciel fait place à ta pensée
Dans son essor impétueux,
Et d’en bas la foule offensée
Baigne tes pieds majestueux :
Levant leur tête moutonneuse,
Les flots, d’une bouche écumeuse,
Mordent ta base encor fumeuse ;
En tes mains prenant le fanal,
Géant, tu grandis dans l’orage,
Tu ris de l’autan qui t’outrage ;
Mais le flot s’abaisse, et sa rage
N’atteint plus que ton piédestal.

Courage, Victor ! les grands hommes
Luttent long-temps contre le sort ;
Étreint dans le moule où nous sommes,
Leur génie, en le crevant, sort :
Tout grand événement s’enfante ;
Avant d’en sortir triomphante,
Au fond de la fournaise ardente
Bout une réputation :
Il a fallu quinze ans de plainte
De sueur et de guerre sainte,
Pour que toute l’Europe enceinte
Accouchât de Napoléon !