Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/174

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par tous les moyens possibles, en un mot, à éviter ou la guerre ou une paix humiliante et trop onéreuse auxquelles le peuple ne souscrirait pas. Mais les Européens, peu au courant des mœurs politiques de la Chine, ne comprennent pas les hésitations de ces fonctionnaires, et ils les accusent de fourberie et de duplicité. Ces reproches ne sont pas fondés et ne sont dignes ni de l’un ni de l’autre des adversaires. On le reconnaîtra le jour où, ayant adopté pour nous-mêmes les principes d’un véritable État démocratique, nous nous déciderons à ne considérer les gouvernements que pour ce qu’ils doivent être.

Si les peuples européens étaient aussi fortement organisés que le peuple chinois, leurs gouvernements n’auraient ni plus d’action ni plus d’initiative et toutes les guerres seraient, demain, terminées. Malheureusement, nous n’en sommes pas là, en Europe. Nos civilisations, mélanges d’éléments apportés par les émigrations les plus diverses, ou produits de notre esprit dont la tendance à l’analyse est le caractère général, sont tellement incohérentes que, pour nous préserver de la dissolution, nous avons toujours cherché à remplacer par une forte centralisation politique et administrative l’unité et la solidarité que nos institutions ne présentaient pas. De là une telle habitude d’être gouvernés que nous n’imaginons pas qu’une société puisse exister sans gouvernement et que nous ne rêvons encore que d’un bon gouvernement, c’est-à-dire d’un gouvernement fort.