Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/230

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les flottes coûteuses qui les protégeaient à l’origine peuvent recevoir d’un instant à l’autre l’ordre de les écraser. D’autres, échouées comme des épaves sur les bords d’un continent à peine connu d’hier, se jalousent dès aujourd’hui et n’aspirent qu’au moment où la plus forte pourra absorber les voisines.

Puis un des lettrés reprit : « Tout autre, monsieur, est notre méthode de coloniser. Nous nous desserrons et ne nous dispersons pas. Nous gagnons de proche en proche, sans nous quitter jamais. Nous ne prétendons pas à la possession d’une parcelle que nous n’occupons pas. Le sol où nous posons le pied est arrosé de notre sueur. Lui et nous ne faisons qu’un. C’est ainsi, c’est en se peuplant, que notre patrie s’est agrandie, et que les cent familles l’ont peu à peu étendue jusqu’aux montagnes du Tibet, jusqu’aux sables du désert et jusqu’à la mer. Ce n’est point par les armes, c’est par la charrue que nous l’avons conquise et que nous la défendons. Enfin, monsieur, et j’aurais peut-être dû commencer par là, nous ne nous trouvons pas malheureux chez nous ; nos champs nous rendent avec usure les épargnes que nous leur confions ; et, excepté les gens tarés, nous n’avons à sacrifier ni un homme ni une sapèque à des colonies extérieures. Que ceux auxquels il plaît d’aller courir de plus grandes chances de fortune dans les pays étrangers y aillent à leurs risques et périls. Nous n’en avons pas besoin et nous n’en attendons rien. » Telles sont les explications que