Page:Féval - La Quittance de minuit, 1846 - tome 4.djvu/60

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
50
QUATRIÈME PARTIE.

rameaux indigents, le cimetière de Knockderry présentait à cette heure un spectacle imposant et solennel.

À la faible lumière des cierges de jonc, les groupes agenouillés prenaient un aspect étrange, les sévères draperies des mantes rouges tranchaient parmi la sombre foule des carricks ; les canons noirs des fusils scintillaient faiblement dans la nuit ; c’étaient partout têtes découvertes et inclinées que voilait l’abondance inculte des grandes chevelures celtiques.

De chaque groupe s’élevait le chant grave et mesuré de la liturgie romaine ; çà et là, dans l’intervalle des strophes, éclataient quelques sanglots étouffés, le cri déchirant d’une mère, la plainte d’un orphelin, le dernier cri d’un amour brisé.

Cela était triste jusqu’à fendre le cœur.

Quelquefois la voix d’un prêtre s’élevait, enseignant la résignation et recommandant l’espérance en un monde meilleur. Les pleurs se séchaient à ces paroles consolantes, et quand le prêtre s’éloignait pour porter aux groupes voisins l’aide désirée de son saint ministère, les pleurs revenaient plus abondants, les plaintes éclataient plus désespérées.

Un seul groupe se taisait au milieu de ce con-